Franklin Azzi, l’insatiable

Franklin Azzi, l’insatiable

À la Glasgow School of Art comme dans son agence éponyme, Franklin Azzi prône la transversalité. Architectes, designers, décorateurs, infographistes, historiens de l’art ou normaliens : ses collaborateurs ont pour point commun leur passion. Et il en faut pour intégrer les prestigieux rangs de ses bureaux, rue d’Uzés. Un atelier industriel de 700m2 dans lequel l’architecte de génie – il se murmure à propos de lui qu’il serait le nouveau Jean Nouvel – peut s’adonner à ses différents projets, au croisement des disciplines et des champs de réflexions, tout en participant activement à la diffusion de l’art contemporain. Son agence y dédie une exposition par an, tout en collaborant sur des missions à grande échelle avec des artistes. Une appétence affirmée qui le fait rêver. Lui aussi se prend à vouloir penser et designer des objets de tous les jours. Voir même des lieux à forte connotation. Familiale ou religieuse. De ce côté-là, Franklin Azzi n’en est pourtant pas à son premier coup d’essai. La ville de Paris lui doit le réaménagement des Berges de Seine. Ou 2,5 kilomètres d’une promenade exceptionnelle sur la rive gauche, située entre le musée d’Orsay et celui du Quai Branly. Un renouveau pour beaucoup, qui désengorge et rafraîchit ce site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Depuis septembre, les étudiants de l’école des beaux-arts de Nantes, située dans les anciens locaux d’Alstom, peuvent eux aussi lui dire merci. Tout comme plusieurs bâtiments, boutiques de créateurs et restaurants, son nouveau challenge. D’ailleurs Beaupassage, un rassemblement d’adresses de bouche appartenant aux plus grands chefs, est sur le point d’ouvrir. 100000 m2 au 53-57 rue de Grenelle dont il a hérité de la réhabilitation. Un chantier titanesque dédié au beau, au bon et au bien-être que l’on a hâte de découvrir.

Entrée Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Entrée Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Franklin Azzi, l’insatiable
Franklin Azzi, l’insatiable

Franklin, comment vous définiriez-vous ?

Franklin

Un grand maniaque !

Pouvez-vous définir votre style ?

Franklin

C’est difficile à dire. Je fais partie d’une génération qui réalise des univers hybrides, à partir de tous ceux de nos anciens. Comme un cadavre exquis. J’aime les années 30, 40, 50, 60, 70, 80, et même 90. En ce moment je redécouvre Ettore Sottsass et le courant de Memphis. Alors notre style est difficile à définir, puisque la seule manière d’avoir de nouvelles choses, c’est l’hybridation.

Qui sont vos collaborateurs ?

Franklin

Ce sont des personnes passionnées par ce qu’elles font et qui pour la plupart ont appris à mes côtés. L’équipe a grandi ensemble, et ce qui fait sa force, ce pourquoi elle se démarque, c’est la variété des profils : on trouve des designers, graphistes, infographistes, architectes, décorateurs, historiens de l’art, normaliens…

Comment avez-vous pensé votre atelier ?

Franklin

Mon atelier se situe à l’emplacement de l’ancien hôtel d’Uzès, transformé en 1767 par Ledoux. En 1870 il est démoli. Des immeubles industriels ont été construits par la suite sur ce même terrain, en une seule grande opération. Cet atelier était un lieu de stockage de la société de confection de vêtements Marcel Boussac, qui a notamment travaillé avec Christian Dior. On a gardé le mobilier d’origine, qui servait à regarder les échantillons de tissus à la lumière naturelle. Ces locaux industriels, de 700m carrés, nous donnent un cadre de travail, avec de grandes hauteurs sous plafonds, qui permettent par exemple d’éprouver les échelles des différents objets et prototypes que nous réalisons. Cet univers industriel correspond à notre discipline.

Ascenseur Entrée Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Livres Inspiration Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Franklin Azzi, l’insatiable Franklin Azzi, l’insatiable Franklin Azzi, l’insatiable Franklin Azzi, l’insatiable Franklin Azzi, l’insatiable Franklin Azzi, l’insatiable
Livre In Out Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Sièges de Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte

La décoration a-t-elle été importante pour vous ?

Franklin

Je différencie l’univers personnel et celui du travail. Chez moi, il y a beaucoup de décoration. À l’agence, j’ai voulu une atmosphère épurée, moins personnelle, focalisée sur la durabilité, l’efficacité, la pérennité des objets qu’on utilise. Il y a du turn-over donc l’idée, c’est de faire un travail sur des objets types pour qu’ils durent.

Quel a été votre parcours ?

Franklin

Il y a deux choses importantes dans mon parcours. Tout d’abord mon passage à la Glasgow School of Art, qui a la particularité que toutes les disciplines se rejoignent, et ce avant le Bauhaus. J’ai appris à dessiner au département de design industriel de voitures comme au département de la mode et du stylisme. Ce qui est fort dans cette école, depuis le départ, c’est l’importance de l’artisanat. C’est une icône des Arts & Crafts, et cela marque ma production. Une autre influence fondamentale est bien sûr celle de mon professeur Paul Virilio, qui a déterminé ma méthode de travail.

Le projet qui vous a le plus challengé ?

Franklin

L’École des beaux-arts de Nantes. C’est un projet particulièrement technique, au croisement de toutes les normes et en même temps très poétique et abstrait. Il s’agit de la reconversion des halles Alstom sur l’île de Nantes. C’est le projet pour lequel l’agence a fait le plus de recherches et de développements ces dernières années. Je pense aussi, pour la complexité des espaces et la recherche des matériaux, aux boutiques d’Isabel Marant à Los Angeles et de Jérôme Dreyfuss à Londres.

Pourquoi portez-vous cette blouse blanche ?

Franklin

Parce que je n’arrête pas de bricoler toute la journée. La blouse m’aide à réfléchir un peu, et si je ne la porte pas je bougne tous mes habits. Et surtout parce que j’aime les uniformes. Comme Martin Margiela !

Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Portrait Franklin Azzi Créateur Franklin Azzi Architecture
Déco Malles Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Plan de Travail Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Salle de Travail Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte

Comment votre agence participe à la diffusion d’art contemporain ?

Franklin

Notre agence rue d’Uzès organise et accueille dans ses murs une exposition d’art contemporain par an. Dans l’idéal on devrait en faire plus ! Parmi les artistes exposés à l’agence nous comptons le collectif Wasistas avec la famille Sperling ainsi que le photographe et vidéaste Sebastian Stumpf et Charles Petit. Je développe aussi des collaborations avec des artistes, notamment Tatiana Trouvé, avec le projet Desire Lines à New York, et Barangaroo à Sydney. Lorsque le créateur veut faire un projet à grande échelle, cela relève presque de l’architecture. Alors moi en tant qu’architecte, je suis là pour résoudre les problématiques de résistance au vent, de fondations, de pérennité des matériaux par rapport au contexte. Et puis, depuis peu, je collectionne. De la peinture des années 1960 à 1980, de l’Op Art notamment.

Que souhaitez-vous réaliser avec votre agence ?

Franklin

J’ai beaucoup construit ailleurs pour des marques françaises, alors j’aimerais à présent qu’une marque étrangère nous appelle ! J’ai aussi envie de bâtir une usine avec un process compliqué, dessiner un bateau, des objets de tous les jours, d’arts de la table, mais aussi des lieux de culte, peut-être un caveau familial ou une église.

Vous travaillez à la fois pour des commandes publiques et privées. Qu’est-ce qui est différent entre les deux ?

Franklin

Dans les commandes publiques, les têtes changent quatre fois entre la première pierre et l’inauguration (j’espère que nos commanditaires ne lisent pas ces lignes !), la mémoire du projet se perd souvent et c’est assez compliqué, en revanche l’image du concours reste souvent fidèle à la réalisation. Dans les commandes privées il s’agit surtout, pour nous, de partenariats avec des promoteurs. Les décisions vont beaucoup plus vite, mais le projet change aussi beaucoup plus. Cela se distingue des commandes de particuliers, que l’on fait peu, sauf si un projet de maison nous intéresse par la géographie de son site, ou l’intelligence de la commande.

Sur lesquelles préférez-vous travailler ?

Franklin

Equal !

Entrée Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Échantillons Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Chaise Table Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Portrait Franklin Azzi Créateur Architecte
Entrée Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte

Quelles sont vos inspirations ? Vos maîtres à penser ?

Franklin

Pour l’architecture, Paul Virilio, Claude Parent, Jean Prouvé et Marcel Gascoin. Du côté de la muisque LCD Sound systeme et Glenn Gould. Geneviève Claisse, Olivier Debré pour la peinture, ainsi qu’Edgar Pillet, qui a travaillé sur l’usine MAME, à Tours, que nous venons de réhabiliter. C’est un travail des années 1950 fascinant, puisqu’il a peint des fresques dans les circulations et les ateliers de production de l’usine. Parce que je veux être le plus complet possible, Lacan pour la psychanalyse, Peter Greenaway, Frank Capra – notamment La vie est belle -, Terry Gilliam, Riddley Scott pour le cinéma. True Detective pour les séries. James Ellroy, Bret Easton Ellis, Jay McInerney pour la littérature. Et enfin, Thomas Ruff pour la photographie.

Avez-vous un processus de création particulier ?

Franklin

Je me nourris d’images et encore d’images. Je suis boulimique ou collectionneur. Google images est, pour moi, un réel outil de travail à l’origine de tout processus de création. Lambda, banales, sans dimension ni volonté artistique : mon iconographie est constituée d’objets à titre informatifs.

Pouvez-vous nous citer un ou plusieurs lieux qui vous inspire, à Paris où ailleurs ?

Franklin

Le cabanon de Le Corbusier où je me rends de temps en temps en pèlerinage pour ne pas oublier ce qu’est la simplicité.

Comment avez-vous choisi le mobilier de votre bureau ?

Franklin

J’aime la modularité et l’ingéniosité des mobiliers USM que je trouve intemporels. La plupart des tables sont des Eiermann distribuées par Sentou. Charles Eames pour les aluminiums chairs. Les mots d’ordres sont durabilité, pérennité, fonctionnalité. Et militaire. J’aime les mobiliers de l’armée suisse, très bien pensés. Nous avons aussi des trousses de premiers secours de l’armée française pour ranger les stylos le soir en partant. Les objets militaires sont des objets parfaits car produits en grande série, il n’y a aucun défaut ! C’est ça qui me passionne.

Plan de Travail Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Ascenceur Entrée Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Holiday Magazine Bureau Franklin Azzi Architecte
Bureau Rue D'Uzès Paris Portrait Franklin Azzi Architecte
Fiole Bureau Rue D'Uzès Paris Franklin Azzi Architecte
Bureau Rue D'Uzès Paris Portrait Franklin Azzi Architecte

Inspiration déco...

Garnier et Linker, maîtres de la matière

Garnier et Linker, maîtres de la matière

Ils nous font redécouvrir des matières oubliées. Guillaume Garnier et Florent Linker sont des créateurs. Des techniciens qui s’amusent de savoir-faire rares qu’ils réinterprètent de manière contemporaine. Leur studio est un lieu...

Vous aimerez aussi

Aucun commentaire

Ajouter un commentaire

Newsletter

Moments capturés. Des intérieurs. Des personnalités. Chaque semaine, seulement pour vous.