Restaurant Chocho de Thomas Chisholm avec tables en bois

ChoCho,
« allier fine dining et Biggie »

Thomas Chisholm brouille les pistes. Dans la toute première adresse parisienne – baptisée Chocho – du jeune chef passé par le concours Top Chef, le ton est donné. Il n’y aura « pas d’étiquette ». Exit les codes de la gastronomie, le créatif offre à qui veut bien y goûter sa version d’une cuisine d’auteur avant tout libre et généreuse. Un refus des conventions également confirmé par la décoration des lieux aux teintes terracotta. Le mélange ému des styles et des époques impulsé par les précédentes vies du restaurant : un ancien magasin de lampes devenu par la suite la propriété de feu Sébastien Demorand. Rien d’étonnant donc à y retrouver l’écriteau conservé « Paris, Lumière » ou encore les tables d’hôtes en bois du très respecté critique culinaire aux côtés de créations contemporaines. Celles de l’illustratrice, et amie, Karla Sutra – des dessins espiègles autrement appelés « sauteries dadaïstes » – qui recouvrent les carreaux de faïence de la salle principale, courent sur les assiettes et jusqu’aux néons de la salle d’eau. De quoi titiller le regard des gourmands, quand ces derniers ne se laissent pas embarquer par la playlist largement influencée par le rap UA des années 1990. Mais le plus fascinant reste quand même ce qui se trame dans l’assiette. Des créations où se rencontrent les multiples inspirations du gourmet, des États-Unis au Sud de la France. À l’image du plat à saucer : « Une assiette qui se compose d’une purée de patates douces rôties, d’un gel de vinaigre de sapin, de beurre de laurier et d’un jus de veau ; servie avec un pain maison cuit à la minute (à la poêle). » Une réjouissance à partager entre copains, aux produits directement sourcés auprès de Terroirs d’Avenir.

Suspensions terre cuite au restaurant Chocho de Thomas Chisholm
Faïences murales dans le restaurant Chocho de Thomas Chishlom
Fleurs séchées restaurant Chocho Thomas Chisholm
ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie » ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie »

Thomas, pouvez-vous vous présenter ?

Thomas

Je suis Thomas Chisholm. J’ai tout juste 30 ans et je suis chef et copropriétaire du restaurant ChoCho à Paris (Xe).

Quel est votre parcours ?

Thomas

Né aux USA (à New York), je suis arrivé en France, à Perpignan, à l’âge de 14 ans. L’entrée dans le système scolaire français, sans lire ni écrire la langue, n’a pas été simple. J’ai été orienté vers une voie professionnelle et j’ai intégré le lycée hôtelier de Perpignan pour passer un BEP et ensuite un Bac pro cuisine. J’ai eu un déclic lors d’un premier stage en cuisine où j’ai pu observer le chef dresser un plat, cela m’a permis de comprendre que la cuisine pouvait être un réel mode d’expression. La passion est donc venue progressivement, avec les rencontres, le travail, les découvertes… Après deux premières années dans le Sud auprès d’un chef étoilé, Christophe Ducros, je suis parti pour Paris. J’ai pu y continuer ma formation auprès de chefs que j’admire : Sylvain Sendra*, Thierry Marx** et plus récemment, Atsushi Tanaka.

 

ChoCho est votre toute première adresse parisienne. Pourquoi avoir choisi ce nom ?

Thomas

Oui, ChoCho est mon tout premier établissement. Son nom a été choisi sans raison particulière, ce qui fait de ce restaurant un lieu libre et sans étiquette. Inspiré du mouvement dadaïste, son patronyme a plutôt été adopté pour sa sonorité et ses deux syllabes. Ici, tout est permis ! Je trouve que c’est un nom simple, percutant et plutôt amusant à prononcer pour des francophones, puisque c’est un mot qui n’existe pas dans la langue française.

Ici, l’on mange à table mais aussi au comptoir. Comment avez-vous pensé cet espace de dégustation avec les architectes ? 
Thomas

Nous avons en premier lieu voulu respecter le travail fait avant notre arrivée pour rendre hommage au célèbre et très respecté critique Sébastien Demorand. Nous avons conservé la grande table d’hôtes centrale, la cuisine ouverte et les luminaires en porcelaine – qui, eux, datent de l’avant-précédente fonction du lieu, un magasin de luminaires (nous en avons aussi gardé l’inscription : « Paris, Lumière », qui était donc déjà sur la devanture). La cuisine ouverte est un élément essentiel pour moi, car il m’est important de pouvoir être en contact direct avec les client·e·s et de vivre un réel moment d’échange. Pour la décoration et l’art de la table, j’ai voulu travailler avec des personnes que j’apprécie. Karla Sutra, qui est une artiste et amie d’enfance dont j’admire le travail, a été présente tout au long du projet. Elle a imaginé des illustrations – ou « sauteries illusionnistes », comme elle les décrit – inspirées par des artistes et des œuvres dadaïstes, que nous pouvons retrouver sur les tableaux en carreaux de faïence dans la salle principale, mais aussi sur les assiettes et avec le néon dans les toilettes. J’ai pu travailler avec deux autres céramistes dont j’admire tout autant le travail : Lou Thomas (simoneloo) et Stéphane Caudron (No Ceramic). Deux belles rencontres. Nous avons également investi le lieu petit à petit. Les étagères de la salle se remplissent, elles aussi, de bocaux de fermentation et conservation, qui, en plus de leur fonction première essentielle en cuisine, sont jolis à regarder. Pour le choix des couleurs, l’idée a été de réchauffer le lieu et de casser la très grande hauteur sous plafond pour rendre le tout plus chaleureux. Notre choix s’est arrêté sur la couleur terracotta, qui résonne en moi à travers des souvenirs d’enfance : chaque été, je venais voir mes grands-parents dans le Sud. J’ai cette image qui me reste : celle des tuiles terracotta sur les toits des maisons. C’était très exotique pour moi et je trouvais ça très beau ! C’était réconfortant, car cela voulait dire que j’arrivais à destination.

ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie »
Suspensions terre cuite au restaurant Chocho de Thomas Chisholm

Nous avons en premier lieu voulu respecter le travail fait avant notre arrivée pour rendre hommage au célèbre et très respecté critique Sébastien Demorand.

Suspensions terre cuite et tables en bois au restaurant Chocho à Paris
Chaises en corde et bois au restaurant Chocho à Paris
Tiroirs terracotta au restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris

… Et pour quelle clientèle ?

Thomas

Le restaurant n’a en aucun cas été prévu pour accueillir un certain type de clientèle. Tout le monde est le/la bienvenu·e ! Il est vrai qu’avec le temps, notre clientèle se transforme petit à petit en foodies et épicurien·ne·s. Ici, l’envie de bien se nourrir prime, avant tout. Que ce soit pour la découverte gustative et visuelle (nous y travaillons tous les jours !) ou pour la santé personnelle et celle de la planète.

La musique a également une place de choix dans l’identité de votre restaurant. Que vous inspire-t-elle au quotidien ? 

Thomas

Oui ! Étant un grand amateur de hip-hop, et de musique en général, l’idée était de servir une cuisine de qualité avec une véritable identité musicale. Pour le plaisir d’abord, et aussi pour créer une ambiance plus décontractée que celle d’un restaurant gastronomique plus classique. On peut allier fine dining et Biggie, et c’est kiffant de le faire.

Vous avez étudié dans la ville catalane de Perpignan. Comment votre double nationalité influence-t-elle votre carte ?

Thomas

Oui, c’est quelque chose que j’ai commencé à construire et qui s’élabore au fur et à mesure. Je ne suis qu’au début de ma carrière de chef et ce n’est aussi que le début de ChoCho. Mais l’envie de créer une cuisine personnelle et originale est en tout cas la base sur laquelle nous travaillons. Mon objectif est de faire une « cuisine d’auteur », comme on dit ! De ce fait, je m’inspire tout simplement de mon vécu, parfois consciemment et parfois inconsciemment. Je pense que nous ne pouvons pas tout expliquer. Mais c’est sûr que New York et Perpignan ont formé mon palais, et sont, je trouve, des endroits riches culturellement et culinairement et qui donc m’inspirent énormément.

Que peut-on manger chez vous ?

Thomas

Tout ce qu’il me passe par la tête ! Un de nos plats signatures par exemple pourrait être Le « Plat à saucer », une assiette qui se compose d’une purée de patates douces rôties, d’un gel de vinaigre de sapin, de beurre de laurier et d’un jus de veau ; elle est servie avec un pain maison cuit à la minute (à la poêle).

Néon Chocho au restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris
Tabouret Kilim au restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris
Spiritueux au restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris
Néon chocho dans le restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris Chaise de bar en corde dans le restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris
Plat à saucer dans le restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris
Fioles en verre au restaurant Chocho de Thomas Chisholm à Paris

Votre cuisine est devenue un véritable laboratoire où vous expérimentez diverses techniques de conservation séculaires. Expliquez-nous votre intérêt pour ces procédés culinaires.

Thomas

En effet, l’équipe de ChoCho et moi-même nous intéressons aux techniques de conservation ancestrales : vinaigre, garum, lacto-fermentation, sirop, déshydratation et maturation. Ces procédés nous permettent à la fois de créer des condiments puissants (naturels) et de respecter au mieux la microsaisonnalité des fruits et des légumes tout en ayant, aussi, des produits à servir hors saison.

ChoCho privilégie un approvisionnement en circuit court. De quelle manière sélectionnez-vous vos producteurs ?

Thomas

Nous choisissons nos fournisseurs sur plusieurs critères : la qualité gustative de la matière première, le respect de l’environnement et de l’humain. Dans toute la chaîne du restaurant, je pense qu’il est important de s’entourer de personnes qui partagent nos valeurs.

Par exemple, nous travaillons avec Terroirs d’Avenir, qui regroupe plusieurs producteurs en se basant sur nos mêmes critères de sélection. Ainsi, à la carte, les clients peuvent déguster de la truite de Banka (Pays basque), des huîtres naturelles (c’est-à-dire non triploïdes) de Jean-Paul Guernier (Utah Beach, Normandie), ou encore les coquilles Saint-Jacques de plongée de Tomy Journaux. Je pense aujourd’hui que la sélection des produits dans une logique du respect du vivant est une de nos missions essentielles en tant que chefs. Nous nous devons de partager le travail des producteurs·trices engagé·e·s et de donner aux client·e·s l’envie (s’ils ne l’ont pas déjà !) de bien se nourrir et d’en connaître plus. Côté prix, on passe du simple au double : par exemple, des saint-jacques pêchées à la drague (pêche qui détruit les fonds marins) coûtent 4,90€ le kg, alors que des saint-jacques de plongée coûtent 10€ le kg. Donc oui, la réalité, c’est que pour l’instant, essayer de bien faire les choses, ça coûte plus cher et nous ne pouvons pas dire le contraire ! Mais pour moi, il n’y a pas de prix pour le respect du vivant et de la santé des clients. C’est un investissement pour notre monde d’aujourd’hui et de demain ; et en cuisine, c’est un réel honneur et bonheur de travailler de tels produits, avec toute cette logique derrière. Pour ce qui est du direct, nous collaborons par exemple avec André Trives, un agriculteur du Roussillon qui travaille en agroécologie (encore plus poussée que le bio !). Nous fonctionnons ensemble un peu comme une AMAP, il nous envoie ce qu’il a récolté et c’est une surprise à chaque livraison.

Où vous retrouverons-nous prochainement ?

Thomas

Vous pouvez nous retrouver tous les jours de la semaine au restaurant ChoCho, au 54, rue de Paradis !

Chaise en corde au restaurant Choco de Thomas Chisholm à Paris
ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie »
ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie »

Nous avons également investi le lieu petit à petit. Les étagères de la salle se remplissent de bocaux de fermentation et conservation, qui, en plus de leur fonction essentielle en cuisine, sont jolis à regarder.

ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie »
ChoCho, <br>« allier fine dining et Biggie »

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