Famille

Dans le quartier de la Presqu'île, un appartement haussmannien à l'harmonie colorée héritée du mouvement Memphis

Irina Aupetit-Ionesco

Chez

Irina Aupetit-Ionesco et Jérémie Patier, Yael 12, Elijah 2 ans

Ettore Sottsass est omniprésent chez Irina Aupetit-Ionesco et Jérémie Patier, que ce soit sur les murs, peints dans des teintes inspirées de son étagère Carlton, ou par des objets, acquis lors de ventes ou de longues parties de chine ! Un culte entretenu par la consultante en image et communication – désormais partagé avec son futur mari – pour l’œuvre de ce « touche-à-tout curieux de tout » qui leur aura permis de s’éloigner du style haussmannien des appartements de la Presqu’île lyonnaise tout en façonnant le leur : « Atypique, comme notre famille. » Venu s’installer à Lyon début 2019, le couple a été rejoint successivement – en l’espace de deux mois ! – par Yael, la fille du réalisateur, puis par Elijah, leur petit dernier de tout juste 2 ans, passant ainsi du duo au quatuor. Une cohabitation vertigineuse mais joyeuse, véritable « maison du bonheur », car, nous confie la Lyonnaise : « La présence des enfants a donné encore plus de sens à cet appartement aux couleurs ludiques dans lequel nous avons créé nos rites et nos habitudes tous ensemble. » Tout en permettant de « s’isoler et de garder un semblant d’intimité » grâce à un espace généreusement ouvert mais fonctionnel, mettant en avant les passions familiales : l’art, la musique mais aussi – et surtout – le design. Un incontournable pour Irina, sur lequel elle est intarissable tant il est intimement lié à son histoire ! À ses grands-parents « dingues de design et d’art africain », à son père designer et architecte d’intérieur, collaborateur – entre autres – d’Andrée Putman et du groupe Memphis mais aussi fondateur avec sa mère du showroom OPUS 31, qui diffusa à partir de la fin des années 1970 Ecart international puis FontanaArte, Flexform, Cappellini ou encore Zanotta. Un terreau culturel riche qui infuse désormais aux côtés de leurs propres références, pour un tout bavard et vibrant dans lequel on se sent bien !

Lieu

Lyon

texte

Caroline Balvay

Photographies

Jeanne Perrotte

Salon avec étagères string et miroir rond chez Irina Aupetit-Ionesco à Lyon
Mur rose et canapé capitonné dans le salon d'Irina Aupetit-Ionesco à Lyon

TSF

Irina, Jérémie : pouvez-vous vous présenter ?

Irina

J’ai 39 ans et je suis consultante en image et communication stratégique entre Lyon et Paris. J’aide des marques et des sociétés à asseoir leur identité ainsi que leur image en définissant des plans de communication et en les mettant en relation avec les bons interlocuteurs. Je rédige des papiers, je fais des interviews et lorsque l’envie m’en prend – et que le temps me le permet –, je « passe des disques ». J’ai toujours été une « femme orchestre » et j’adore ça ! Jérémie et moi avons comme gros projet de réaliser un documentaire ensemble sur la maltraitance infantile. Nous travaillons dessus pour le sortir en 2022 car c’est un sujet qui nous tient vraiment à cœur. Pour finir, et peut-être avant toute chose, je suis la très heureuse compagne de Jérémie et la mère et belle-mère comblée d’Elijah et Yael.

Jérémie

J’ai 41 ans, je suis réalisateur et j’ai trois enfants dont le petit dernier, Elijah 2 ans, que nous avons eu avec Irina. Notre rencontre est cinématographique, tout a commencé sur un plateau de tournage à Marseille et surtout autour du film Lost in translation de Sofia Coppola.

TSF

Quel est votre parcours ?

Jérémie

Dès l’entrée au lycée, j’ai su que je voulais faire partie du monde de l’image car cela me permettrait de toucher à tous les arts. J’ai toujours été passionné par la peinture, la photo, le documentaire, le cinéma, le clip… Il me fallait un métier qui réunisse tout cela. Je voulais être directeur de la photographie dans un premier temps puis, très rapidement, la mise en scène a pris le dessus. J’ai fait mes études à l’université Paris 8 et j’ai eu la chance de vite travailler sur des tournages de clips musicaux. Je suis devenu passionné des tournages et je n’ai pas arrêté depuis en passant d’assistant réalisateur à réalisateur. Je fais ce métier depuis vingt ans maintenant.

Irina

J’ai commencé mon cursus bidisciplinaire de communication et de sciences politiques à Lyon, puis j’ai fait mon stage de fin d’études à Paris où je suis restée, ayant trouvé du travail dans la communication. Je suis beaucoup sortie seule les premières années et j’ai rencontré énormément de gens dont mon ancienne associée avec qui j’ai monté ma première entreprise de communication 360°. En 2007, en pleine crise financière, les marques ne faisaient plus confiance aux grands groupes. Nous voulions les rassurer et être leurs interlocutrices. Il n’y avait plus d’intermédiaires, et surtout nous étions deux jeunes femmes dans un milieu qui, à l’époque, était encore très masculin. Nous avions reçu la confiance de belles enseignes comme Colette et de groupes prestigieux comme Renault ou Luxottica. Nous étions ce que nous faisions et nous faisions ce que nous étions, tout en restant profondément naturelles et spontanées. Après cela, je suis intervenue en mission pour des agences ou des enseignes comme Savoir Faire, DDB, Welove, TEDx, ou des artistes et des personnalités comme Nabilla. J’ai été chassée par un gros producteur de TV pour devenir directrice artistique et brand manager de la série Plus Belle La Vie. Le challenge était un peu fou après avoir passé quinze ans à Paris dans un univers très « branché » et pointu. J’ai rencontré Jérémie sur le tournage. Nous nous sommes liés d’amitié et, par la suite, je suis tombée très amoureuse de lui. Toute ma vie professionnelle s’est construite autour des rencontres, des hasards, et des opportunités, mais surtout de la passion. J’ai besoin d’être attirée par le discours de l’autre pour travailler avec lui. L’agence et showroom Arrivetz, un de mes clients, a été reprise par un duo de femmes fortes qui gèrent cette institution lyonnaise du design d’une (ou plutôt de deux) main(s) de maître. Sans cette énergie qu’elles dégagent, l’étincelle ne se serait pas créée. Je dois admettre que c’est une chance folle de ne travailler qu’avec des gens qu’on aime.

Salon avec mur orange et étagères String chez Irina Aupetit-Ionesco à Lyon
Fauteuil Warren Platner et bureau en bois chez Irina Aupetit-Ionesco à Lyon

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  • Parlez-nous de votre éducation. Dans quel cadre avez-vous grandi – et par conséquent vu se former votre goût ?

Jérémie

J’ai vécu en banlieue parisienne dans un milieu modeste, élevé seul par ma mère. Cette dernière a toujours été curieuse et m’a éduqué à l’écoute des autres. Les livres et les disques qui jonchaient les étagères de l’appartement ont été mis à ma disposition, mais c’est surtout le centre aéré et les activités organisées par les écoles qui m’ont ouvert au monde des arts. J’y ai développé mes premières photos en argentique, assisté à des opéras, fait des colloques à la Sorbonne avec Umberto Eco, Élie Wiesel. J’y ai rencontré des cinéastes, des auteurs de romans noirs, fait toutes sortes d’activités manuelles et artistiques. Les institutions républicaines m’ont ouvert l’esprit et donné accès à tous ces univers. L’attrait pour la décoration est venu avec mon métier mais c’est ma rencontre avec Irina qui a affûté cette passion. Son savoir est immense et sa passion pour ce domaine également.

Irina

Mes grands-parents étaient des dingues de design et d’art africain. À une époque où les gens achetaient du Louis Philippe ou du Louis XV, eux préféraient du Tecno, du Warren Platner ou du Charles et Ray Eames. Ils ont acheté leurs premières grosses pièces chez Arrivetz – la boucle est donc bouclée aujourd’hui (rires). Enfant, j’allais presque tous les étés avec eux dans le Luberon, à Lourmarin et nous allions chiner à L’Isle-sur-la-Sorgue. Ma grand-mère passait des heures à discuter avec les vendeurs. Elle a une culture incroyable qu’elle n’a pas perdue et qu’elle entretient toujours ! En parallèle, mon père était designer/architecte d’intérieur. Il travaillait avec Andrée Putman et avait un showroom à Lyon avec ma mère où ils diffusaient Ecart international, FontanaArte, Flexform, Cappellini ou encore Zanotta. C’est après cela qu’il a rencontré le Groupe Memphis et surtout Martine Bedin avec laquelle il fit une exposition. Au début des années 2000, il collabora avec Jasper Morrison, Ettore Sottsass, Michele De Lucchi, et de nouveau Andrée Putman. À l’époque, je ne comprenais pas forcément l’importance de ces personnes car mon père est quelqu’un de très simple et d’humble. Il n’a jamais fait état de toutes ces collaborations ! Néanmoins, il est indéniable que toutes mes références sont issues de là.

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  • Designers, artistes : quels sont ceux dont l’œuvre a eu une influence particulière sur vous, votre travail ?

Jérémie

David Lynch, car pour moi il vit l’art au sens plein et profond du terme puisqu’il est cinéaste, peintre, plasticien, photographe, musicien… Tout ce que j’ai toujours souhaité être.

Irina

Des femmes fortes et libres comme Charlotte Perriand ou Florence Knoll qui ont vécu à époque misogyne et à l’acmé du patriarcat. Puis Ettore Sottsass forcément. Mon idole, touche-à-tout et curieux de tout en partant du pop art, en passant par la Beat Generation, Poltronova, Olivetti, la céramique, l’antidesign, le Groupe Memphis. Une vie infiniment riche, remplie de rencontres. Un vrai passionné et une façon de voir la vie tout en couleur !

TSF

  • Racontez-nous l’histoire de votre emménagement ici, à Lyon.

Jérémie

Nous passions les fêtes de fin d’année chez les parents d’Irina à Lyon et je suis tombé éperdument amoureux de cette ville. Irina et moi travaillions régulièrement dans le Sud (Marseille et Sète) depuis quelque temps.  Un après-midi ensoleillé et froid, nous avons traversé la passerelle du palais de justice dans le quartier de Saint-Jean. Je me souviendrai toute ma vie du moment où j’ai pris une photo d’Irina sur cette passerelle et où j’ai eu une vision de nous, habitant dans cette ville qui est sa ville de naissance. Je nous voyais la traversant avec notre futur enfant. Je lui ai dit « Je me sens bien ici, ça ne te dit pas qu’on s’y installe ? » Un an plus tard, nous arrivions. Lyon est une ville inspirante. C’est aussi le lieu de naissance du cinéma… il n’y a pas de hasard.

Irina

Je suis née ici et j’ai vu la ville se décomplexer face à Paris alors même que je vivais là-bas. Lyon revendique de plus en plus le fait d’être la capitale de la gastronomie, à juste titre. Mais pas que. La culture y est de plus en plus présente entre Les Subsistances et la programmation pointue du Transbordeur, du Sucre, du TNP ou encore du MAC. Depuis dix-neuf ans, il y a le festival Nuits Sonores qui est une institution pour les amateurs de musique comme Jérémie et moi. Idem avec le festival Lumière qui est une sorte de mini festival de Cannes mais où les protagonistes sont plus accessibles et détendus.

Salle à manger jaune avec chemin de table coloré chez Irina Aupetit-Ionesco-Ionesco à Lyon

Nous voulions un appartement ouvert, fonctionnel dans lequel tout le monde pouvait être ensemble mais qui permettait aussi de s’isoler et de garder de l’intimité.

TSF

  • Comment avez-vous pensé votre appartement ?

Jérémie

Nous voulions un appartement ouvert, fonctionnel dans lequel tout le monde pouvait être ensemble mais qui permettait aussi de s’isoler et de garder de l’intimité. Très vite, nous avons déterminé une harmonie colorée pour les murs. Très vite aussi, le mouvement Memphis s’est imposé comme le lien de tout ce qui a suivi.

Irina

Nous voulions de la lumière et de l’espace, ce que nous n’avions pas forcement à Paris. Nous avions priorisé les recherches d’appartement dans le centre de Lyon à proximité de tout pour pouvoir nous déplacer facilement avec les enfants, n’ayant pas de voiture, et voyageant très régulièrement.

TSF

  • Quelles pièces est-il possible d’y retrouver ?

Irina

Il y a les choses qui sont visibles comme nos livres à Jérémie et moi, des œuvres d’artistes que nous adorons comme Daniel Johnston, Romain Slocombe, Mrzyk & Moriceau, Fafi, Nathalie Du Pasquier, notre petite collection de vinyles et d’objets de Sottsass que nous avons acquis lors de ventes ou sur le boncoin comme la machine à écrire Valentine qu’il a dessinée en 1969 pour Olivetti. Nous avons beaucoup d’objets que nous avons rapportés de Tanger, mais qui n’appartiennent pas au folklore marocain attendu. Je commence à épurer ma collection de chaussures après avoir conservé plus de 300 paires pendant des années, je m’en sépare petit à petit. Idem pour mes sacs et mes vêtements. Le fait d’avoir des enfants, et peut-être aussi d’avoir été confinés, nous a donné envie de nous investir dans notre intérieur et dans les voyages plus que dans le reste.

TSF

D’où vous vient ce besoin de couleur, que l’on retrouve en aplats généreux sur vos murs, votre mobilier et sur vos divers objets ?

Irina

Le noir et blanc se retrouve dans nos objets ou sur des pièces fortes comme notre table de salle à manger et les chaises Mallet Stevens qui l’entourent. L’harmonie colorée que nous avions définie au départ avait pour but de magnifier les volumes. Nous nous sommes inspirés des couleurs de la Carlton de Sottsass pour notre choix. Le rose que nous avons choisi pour la cheminée et notre chambre est assez inattendu. Les appartements de type haussmannien sont souvent blancs et immaculés ; nous voulions tout le contraire. Quelque chose d’atypique, comme notre famille.

TSF

  • Que raconte ce lieu de vous ?

Irina

C’est un peu basique de dire que ce lieu n’est que bonheur mais c’est vraiment le cas. Yael est venue vivre avec nous en novembre 2019 et Elijah est né en décembre de la même année, nous avons été confinés trois mois plus tard. Nous sommes passés de 2 à 4 en peu de temps, et la présence des enfants a donné encore plus de sens à cet appartement aux couleurs ludiques dans lequel nous avons créé nos rites et nos habitudes tous ensemble. Cette maison du bonheur nous ressemble beaucoup.

TSF

  • Pour vous, The Socialite Family, c’est… ?

Irina

Une jolie curiosité ! Des gens que l’on a envie de rencontrer, de côtoyer, aux parcours atypiques. Une gamme d’objets, bien dessinés, aux couleurs lumineuses et intemporelles.

TSF

  • Vous apprenez à redécouvrir cette ville au quotidien. Quels y sont vos derniers coups de cœur ?

Irina

De retour à Lyon, j’ai redécouvert le travail de la photographe lyonnaise Emmanuelle Firman dont je voudrais organiser une exposition à Arles. Elle utilise la lumière comme personne. Concernant les adresses… difficile d’être succinct. Pour un repas beau et bon sur le pouce, nous allons chez Ban. Jérémie et moi avons élu comme cantine le Bistrot Bondy. Nos deux boutiques préférées sont Blitz et évidemment Arrivetz 24. Pour les disques, nous allons chez Sofa Records et Au Passage pour les livres des enfants ainsi que les nôtres. Et un endroit « multimarques » incroyable, Tandem, où nous achetons nos sauces Matshi.

TSF

  • Où vous retrouverons-nous dans les prochains mois ?

Irina

Tous les quatre en train de nous câliner dans notre salon, ou en goguette à l’étranger si la situation sanitaire nous le permet. Plus sérieusement, nous serons au festival Nuits sonores du 25 au 29 mai, à Tanger aux côtés de ma grand-mère et/ou dans notre maison de famille qui n’est pas loin de chez elle, et à Arles pour les Rencontres photographiques, comme chaque année depuis que nous nous connaissons avec Jérémie. Nous avons également booké trois dates en France pour aller voir les spectacles de Gisèle Vienne. Puis nous serons au festival de Hyères en octobre !

La présence des enfants a donné encore plus de sens à cet appartement aux couleurs ludiques dans lequel nous avons créé nos rites et nos habitudes tous ensemble.

Salon orange avec capitonné chez Irina Aupetit-Ionesco à Lyon
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