Fabrizio et Nelcya Cantoni

Chez

Nelcya et Fabrizio Cantoni, tresseurs d’histoires

Nelcya et Fabrizio Cantoni sont les fondateurs de cc-tapis, une entreprise ayant consacré l’accessoire favori de nos sols en véritable œuvre d’art. Une perspective nouvelle pour ces objets décoratifs qui prennent de plus en plus de galons, mais pas vraiment une surprise pour le couple. En s’inspirant de la Maison Chamszadeh – magasin tenu à Strasbourg par le père de Nelcya et réputé pour ses tapis persans noués à la main –, le duo décide il y a quinze ans de révolutionner l’univers du tapis traditionnel en collaborant avec les plus grands. Architectes, designers : tous s’attellent à imaginer, pour ces produits exceptionnels tissés au Népal par des artisans tibétains, des formes et des graphismes puisant dans l’histoire de l’art. Fort d’un contrôle total du processus de production et donc des savoir-faire qui en émanent, cc-tapis peut se targuer d’être la seule à maîtriser certaines originalités rendant son style unique. Un luxe qui charme un large panel de clients et que notre œil rencontra souvent dans les pages de magazines avant que nous ayons l’opportunité de nous glisser dans l’appartement de la famille Cantoni. Visite haute en couleurs – à l’image de leurs collections – à Milan, là où la société est installée depuis 2011.

Lieu

Milan

texte

Caroline Balvay

Photographies

Constance Gennari

TSF

Nelcya, Fabrizio : pouvez-vous vous présenter ?

Nelcya

Je suis Nelcya née d’un papa iranien et d’une maman française. J’ai rencontré Fabrizio à l’école hôtelière de Lausanne il y a 25 ans et nous nous sommes mariés à Portofino.

Fabrizio

Ma mère est anglaise, mon père est italien. C’est chouette car notre fils, c’est un peu celui du nouveau monde, il a quatre origines différentes ! Nous nous sommes rencontrés à Lausanne et avons commencé notre carrière dans l’hôtellerie. J’étais vice-directeur à l’Excelsior Palace à Portofino et Nelcya, elle, travaillait à Gênes au Starhotels President. Nous nous sommes mariés à Portofino puis avons arrêté l’hôtellerie et nous sommes réinventés ! Au début, nous voulions partir à New York. Notre idée, c’était d’ouvrir un délicatessen franco-italien mais finalement, nous ne l’avons pas fait. Là-dessus, le père de Nelcya nous a dit que si l’on souhaitait faire un tour par Strasbourg pour travailler avec lui, voir si ça pouvait nous plaire, nous étions les bienvenus. Son univers, c’était les tapis. Des tapis persans traditionnels.

TSF

Comment est né cc-tapis ?

Nelcya

Le fait de passer de l’hôtellerie au tapis a été un peu un choc pour nous. Le tempo était très différent. Mais nous avons finalement trouvé notre voie. Tout s’est concrétisé lors de notre voyage à Los Angeles où nous avons remarqué dans une vitrine de Melrose un tapis que nous n’avions jamais vu auparavant. Nous nous sommes renseignés et avons appris qu’il s’agissait d’un tapis tibétain et qu’il était possible de le customiser. L’idée était brillante et elle nous a poussés à développer notre vision du tapis. Fabrizio est un grand passionné de design et donc nous avons fait nôtre cette envie. Nous nous sommes bien réparti les rôles et avons créé cc-tapis en 2001. Cela a commencé avec un magasin, cc-tapis, puis avec un autre, L’Appart, où nous vendions tout de la petite cuillère au canapé. En 2006, nous avons décidé de nous consacrer exclusivement à l’aventure cc-tapis, à Strasbourg. Fabrizio voulant toujours toucher à l’univers du design, nous nous sommes dit qu’il était temps de reprendre des études et donc de venir à Milan (lieu où était l’école). Nous ne devions rester – à l’origine – que neuf mois. En fin de compte, nous sommes ici depuis dix ans. Nous avons rencontré Daniele Lora, l’actuel directeur artistique et associé. L’image, l’harmonie, la cohérence de ces tapis : c’est lui. Tous ensemble, nous avons commencé à collaborer puis avons trouvé un showroom à Brera. En bref : nous nous sommes lancés et avons eu une chance incroyable, car rien n’était prévu au départ. Aujourd’hui, nous sommes très complémentaires tous les trois.

TSF

Que veut dire cc ?

Fabrizio

Ce sont les initiales de nos deux noms : Chamszadeh et Cantoni. En arrivant en Italie, nous avons voulu conserver notre consonance française car ça fait quand même chic !

TSF

Pourquoi avoir choisi de passer du tapis persan, historique, à une offre plus « contemporaine » ?

Fabrizio

En allant travailler avec le père de Nelcya, nous avons vraiment appris à aimer le tapis de qualité. C’est-à-dire le tapis persan ou le tapis turc. Il fallait toujours garder à l’esprit la qualité et la tradition. Et puis a eu lieu cette rencontre avec le tapis tibétain à Los Angeles et donc l’idée de pouvoir développer des collections. À l’époque, par exemple, il y avait à Strasbourg la salle de l’Aubette qui venait de rouvrir après restauration. C’était une salle de divertissement créée dans les années 1920 par Theo van Doesburg, Sophie Taeuber-Arp et Jean Arp. Nous avions l’impression de rentrer dans un tableau de Mondrian. C’était spectaculaire ! La première collection que l’on a faite était donc inspirée du travail de Sophie Taeuber-Arp. Elle était tout en soie. Nous l’avions fait produire en Chine. Ça a commencé comme ça ! Rien n’était vraiment réfléchi. Puis une fois que cc-tapis est arrivé à Milan et que Daniele nous a rejoints, il a apporté de la cohérence à tout cela. Nous étions les premiers à faire des motifs inspirés des années 1950 pendant que l’offre de tapis était uniforme autour de nous. Ça a marqué un tournant, car nous avions une signature reconnaissable. Petit à petit, nous nous sommes fait connaître dans le milieu et avons décidé de gérer notre chaîne de production au Népal. C’est un gage de qualité car rien n’est sous-traité.

TSF

Racontez-vous le processus d’élaboration d’un tapis ? En quoi sont-ils différents ?

Fabrizio

Nous ne considérons pas le tapis comme étant purement décoratif, mais ça n’engage que nous ! Pour nous, un tapis fait partie intégrante d’un projet d’habitation. Il faut que l’ensemble veuille dire quelque chose. Nous essayons toujours de rester en dehors des tendances puisque le propre d’une tendance, c’est qu’elle se termine alors que nos tapis durent très très longtemps. Nous avons une collection signature – en plus de celles imaginées par notre creative lab – où des stylistes (Faye Toogood), des architectes, des designers (Patricia Urquiola, Martino Gamper, etc.) et des artistes (Federico Pepe) peuvent s’exprimer à leur manière. Donc nos tapis sont souvent très différents les uns des autres. Ce qui les rassemble, c’est la qualité. Le fait que cc-tapis est une recherche permanente de matériaux, de finitions, comme lors de notre dernière collaboration avec Bethan Laura Wood. Je pense que c’est ça qui distingue cc-tapis. De manière générale, nous ne travaillons qu’avec des personnes que nous aimons.

TSF

Mêler éthique – avec votre association CC-for Education – avec esthétique, est-ce une volonté depuis le départ ?

Nelcya

Non, car au départ nous n’étions pas dedans, il fallait que ça marche. Après avoir arrêté de travailler avec la Chine (à cause des conditions de travail), nous nous sommes très naturellement tournés vers l’Inde. Puis il y a eu le coup de foudre avec le Népal. Avec les gens, les noueurs. Les Népalais sont des gens très solaires, très positifs. Ce fut une évidence. Après avoir visité des écoles là-bas en 2015 avec notre fils et subi le tremblement de terre, nous avons décidé de fonder à notre retour notre association. Quinze jours plus tard, nous organisions une soirée Design for Népal où nous avons fait appel à tous les revendeurs design multimarques de Milan qui nous ont offert du stock que l’on a vendu. Lors de cette première soirée, nous avons donné tous les fonds récoltés pour que 20 familles puissent de nouveau avoir un toit. À partir de là, nous avons commencé Design for Népal pour les écoles. Nous donnons aussi un pourcentage de notre bénéfice tous les ans pour les enfants. Au début, en 2015, nous en avons aidé huit. Maintenant, plus de 45 ! Nous voulons continuer et essayer d’avoir toujours des projets pour aller plus loin avec cette association. Ce sera bientôt le cas à Paris avec une nouvelle très excitante que nous allons prochainement annoncer.

TSF

Quelles sont vos références graphiques, stylistiques ? Ce qui vous inspire dans la création ?

Fabrizio

Là, vraiment, il aurait fallu que Daniele soit là ! Personnellement, ça marche au feeling, au gré des découvertes, grâce à la curiosité. Évidemment, quand j’ai commencé : Gio Ponti ! C’est le père du design italien. Ce qu’il a fait à partir des années 1930-1940, c’est tout simplement magnifique. Un des tout derniers tapis que j’ai dessinés s’appelait « Lost in the Fifties ». En faisant des recherches, j’ai découvert un travail que Gio Ponti avait réalisé à la fin des années 1940, le plateau d’un bureau qui m’avait beaucoup plu. En étant un peu curieux, j’ai découvert à Naples la Cappella Sansevero d’où je pense que Ponti a tiré son inspiration pour le fameux plateau de bureau. C’étaient les mêmes motifs sur le marbre et sur la marqueterie du bois utilisé par lui. En bref, nos inspirations viennent de l’art, des voyages, des artistes que l’on aime.

TSF

Chez vous, quel est votre style ?

Nelcya

Il n’y a pas un choix d’artistes en fait. Il y a un choix de coups de cœur, de choses chinées, le tout depuis plus de vingt-trois ans !

Fabrizio

Nous avons peut-être des choses qui commencent à prendre un peu de valeur, mais sinon ça va du dessin de mon neveu et celui d’une amie à des affiches qu’on adore et d’autres de Shepard Fairey – signées Obey  – à Takashi Murakami, Jeff Koons… Puis il y a beaucoup d’art toys. J’adore Kozik par exemple ! Donc il y a les bustes de tous les dictateurs (détournés, je précise), ce qui exaspère Nelcya. Lors d’un voyage à Tel-Aviv, nous avons aussi découvert des broderies. Dans le même genre, nous avions une amie qui en faisait également sur d’anciennes gaines des années 1920 avec des scènes érotiques magnifiques entre femmes. Disons que chez nous, il y a vraiment de tous les niveaux de styles. C’est assez hétéroclite !

TSF

Comment avez-vous choisi votre mobilier ?

Fabrizio

Là aussi, c’est un mélange. Évidemment, nous aimons le design, donc il y a beaucoup de pièces signées (ou non). Les premières que nous avons possédées, c’est un cadeau du père de Nelcya, il s’agit de nos chaises Verner Panton. Puis nous avons amassé petit à petit des coups de cœur dès que l’on pouvait se le permettre.

Nelcya

Le premier beau meuble que l’on s’est acheté, c’est le Multileg Cabinet de BD Barcelona que l’on a dans la cuisine maintenant. L’idée, ça a toujours été de mélanger, car nous avions aussi des meubles anciens qui étaient à ma mère comme notre secrétaire, la console de l’entrée.

Fabrizio

Il y a aussi un clin d’œil à l’hôtellerie, avec la salle à manger qui est faite « style bistrot ». Il s’agit des meubles du Café Marly au Louvre. Nous trouvons ça très chaleureux.

TSF

Avec qui rêvez-vous de créer un tapis ?

Nelcya

Franchement, avec une rockstar ! J’adorerais. Un « au hasard » qui a déjà travaillé avec Kartell, pourquoi pas avec Lenny Kravitz ! (Si vous me lisez, n’hésitez pas.)

Fabrizio

Si je devais parler personnellement, étant une vraie fashionista, je ne dirais pas non à Alessandro Michele.

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