Famille

A Paris, un duplex aux poutres anciennes repensé avec modernité et sobriété

jordane arrivetz

Chez

Jordane Arrivetz, Adrien Ohannessian Oscar, 7 et Ysé, 4 ans

Son nom ne vous est sans doute pas inconnu : en 2021, l’architecte d’intérieur Jordane Arrivetz signait le décor spectaculaire aux accents seventies du bar-restaurant Bonnie, pensé comme un écrin de verre à la vue à couper le souffle, posé comme en équilibre au faîte de l’hôtel SO/PARIS. Depuis, la décoratrice enchaîne les projets plus luxueux les uns que les autres. Admettons-le : The Socialite Family était bien intrigué par l’intérieur privé de l’architecte. Jordane Arrivetz, Adrien Ohannessian et leurs enfants Oscar et Ysé nous accueillent dans un duplex lumineux au cœur de Paris. Les poutres en chêne d’origine surlignent, comme un clin d’œil au quartier ancien où l’on se trouve, un intérieur épuré, parsemé de pièces de design historique. Une vraie petite maison dans l’immeuble, pensée par le couple comme une respiration, un intérieur serein, pour toute la famille. Visite guidée.

Lieu

Paris

texte

Elsa Cau

Photographies

Constance Gennari

TSF

Jordane, Adrien, présentez-vous.

Jordane

Je suis décoratrice et architecte d’intérieur. Je dirige une agence d’une dizaine de personnes qui réalise principalement des projets d’hôtels et de restaurants. J’ai monté mon agence il y a sept ans, juste après avoir eu mon premier enfant, Oscar. Avant cela, j’ai été directrice artistique pour le groupe Coste. J’ai travaillé pendant cinq ans aux côtés du maître en la matière, selon moi, Jean-Louis Coste, sur le développement de ses projets. C’est ce qui m’a donné envie de continuer dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration. Je suis diplômée d’architecture intérieure à l’école Camondo.

Adrien

J’ai lancé une entreprise il y a deux ans et demi, à l’origine spécialisée dans les NFTs (non fungible tokens, ndlr). Je travaille avec des artistes, des marques et des institutions. Là, on vient d’emménager dans ce nouvel appartement, dans ce nouveau quartier. Vous nous prenez au début d’une nouvelle ère.

TSF

Décrivez-nous votre style, Jordane.

Jordane

Je ne sais pas vraiment définir mon style, parce que je ne cherche pas forcément à en avoir un. J’en ai sans doute un par la force des choses, mais mes projets sont tous tellement différents que je m’adapte vraiment au contexte et à l’histoire du lieu, à son emplacement et aux personnes avec qui je suis en dialogue. Tout projet est différent parce que, évidemment, on n’imagine pas les mêmes choses pour un restaurant à Paris, un palace à Genève ou une plage à Cannes. Donc, à chaque fois, c’est autre chose. En même temps, je crois qu’une constante chez moi, c’est de mélanger les références historiques de façon assez libre et de les associer dans mes projets. Je suis très inspirée par les années 1970 et 1980. Question matériaux, j’aime le chrome, le bois, la pierre. Si je me compare à d’autres décorateurs, je travaille relativement peu la couleur et le motif. Je suis toujours à la recherche, il me semble, d’une certaine forme de simplicité globale dans la lecture des espaces. Je n’aime pas forcément ce qui est trop « déco », ou bien chargé.

TSF

Avez-vous une obsession en ce moment : un matériau, un motif ?

Jordane

Je ne cherche pas forcément à beaucoup innover. J’aime les matériaux nobles. Les variations sont innombrables rien qu’avec ceux-là : je n’utilise pas le même bois, ni la même pierre… C’est vraiment le dessin qui crée un intérieur unique.

TSF

Racontez-nous l’histoire de ce lieu.

Jordane

Ce qui nous a plu dans cet appartement, c’est qu’il n’est pas haussmannien, contrairement au précédent dans lequel nous avons passé sept ans. Pour nous, emménager ici, dans cet appartement avec poutres et en duplex, avec de petites chambres perchées, c’était un peu comme avoir une maison dans la ville. Pour le décor, j’ai collé à cette idée, j’ai repris les matériaux que j’utilise d’habitude, simples et nobles. On a voulu créer un espace chaleureux mais assez neutre. Je préfère effectivement créer des environnements où je laisse la place aux objets. J’achète beaucoup d’art et de design.

Ce qui nous a plu dans cet appartement, c'est qu'il n'est pas haussmannien

TSF

Pouvez-vous nous parler d’une pièce en particulier, ici ?

Jordane

Ici, il y a un mélange de nos goûts et des objets hérités de nos familles. Cette liane tissée, là, qui dégringole des étagères du salon, c’est de Sheila Hicks, qui était une bonne amie de mon grand-père, galeriste à Lyon et très en avance sur son temps. Ce pouf en bois, qui n’est pas vraiment un pouf, posé au sol devant la table basse, appartenait aussi à mon grand-père ; j’ai joué dessus toute ma vie. Maintenant, je peux disputer mes enfants quand ils jouent dessus à leur tour. Il voisine avec des pièces acquises par nos soins, comme la grande suspension d’Ingo Maurer au-dessus de la table de salle à manger, qui est l’une des premières pièces achetées pour l’appartement, avant même que je le redessine. Les chaises en métal chromé des années 1980 sont d’un designer assez méconnu, quoique conservé au Centre Pompidou et qui a dessiné du mobilier pour l’Élysée, entre autres : Ronald-Cecil Sportes. C’est ma dernière acquisition. Il y a aussi ce fauteuil qui est dans la chambre, le prototype de celui qu’on a dessiné pour notre dernier projet.

TSF

On voit beaucoup de photographies, aussi.

Jordane

Oui. Celle-ci, dans le salon, est amusante : c’est une photographie ancêtre de Photoshop !  On l’a retouchée à la main pour supprimer la femme de la photo avant publication dans un journal.

TSF

Voilà qui doit vous interpeller, Adrien ! Parlez-nous de votre métier, justement.

Adrien

J’accompagne mes clients dans ce nouveau monde qui est technologiquement assez complexe. La blockchain ne met pas tout le monde à l’aise. J’ai un double parcours dans la culture et dans l’innovation. J’étais au pôle digital de trois maisons de disques, tant des labels indé que de grosses maisons. J’ai notamment exercé en tant que directeur d’innovation chez Universal Music pendant six ans en France. Donc, j’ai toujours fait ce double métier : travailler avec des artistes et appréhender les nouvelles technologies, faire en sorte que ce soit pérenne, utile, que ça fonctionne avec les artistes. C’est exactement ce que j’ai fait dans les NFTs, qui sont très excitants parce que c’est un nouveau monde. On n’est pas nombreux en France à savoir faire ça. C’est pourquoi nous avons pu obtenir des clients prestigieux, très rapidement. La question de la blockchain me passionne, notamment d’un point de vue d’utilité publique. Nous venons d’ailleurs de lancer une deuxième société : Vérifiables ; une solution basée sur la blockchain qui permet de créer des certifications académiques et professionnelles. Par exemple, en 2024, nous travaillerons sur le projet de créer un double digital des diplômes. Cela nous fait rencontrer des institutions publiques et des universités pour leurs besoins. Dans un écosystème où il y a tant de faux, qui représentent un vrai marché mondial, notamment avec l’intelligence artificielle, ce sont des questionnements de fond.

TSF

Vous semblez porter le sujet un peu plus loin.

Adrien

La blockchain, si on s’en tient aux droits des artistes par exemple, est une réponse, en quelque sorte, à la surconsommation des contenus. Une rébellion contre les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon, ces entreprises toutes puissantes qui ont envahi notre quotidien, ndlr). Il y a des artistes qui sont recherchés sur Google, dont les représentations se retrouvent sur des fichiers PDF et qui ne sont jamais rémunérés. Avec la blockchain, ce n’est plus possible, c’est-à-dire qu’on ne peut plus utiliser l’image de quelqu’un gratuitement. Ça résout quand même pas mal de problèmes du monde digital, de l’abondance digitale par laquelle on a accès à tout, gratuitement, ce qui est anormal. La blockchain permet de faire valoir potentiellement ces droits et d’éviter les dérives de la consommation. Donc, il y a quand même aussi un acte militant là-dedans, c’est vraiment un contre-mouvement. Je pense que c’est ça qui m’intéresse, moi, les valeurs presque anti-État de ce monde-là, un peu comme le punk à une époque dans la musique ! Les technologies, quelque part, servent aussi à s’affranchir de l’État.

Dans le salon, une oeuvre textile de Sheila Hicks, héritée du grand-père de Jordane Arrivetz, cohabite avec la bibliothèque.

TSF

La musique fait-elle toujours autant partie de votre vie ?

Adrien

Oui. Le premier projet sur lequel j’ai travaillé, d’ailleurs, était avec Jacques, un artiste expérimental français, qui m’a présenté Agoria avec qui je travaille toujours. Ensuite, plusieurs grandes maisons ont fait appel à nous, comme Dom Pérignon, Évian, Renault, des marques dans le Web 3 hyperconnues comme Ledger. Mais nous conservons cet ADN de forte proximité avec les artistes, de créativité, parce que c’est un monde créatif. Finalement, j’ai toujours l’impression d’avoir exercé le même métier, il n’y a qu’un pas entre les structures internes d’innovation que j’avais montées chez Universal et mon activité actuelle avec les artistes, par exemple ! C’est l’évolution naturelle des technologies.

TSF

Comment vos familles, votre éducation ont-elles influencé vos goûts ?

Jordane

Du côté de mon père, mon grand-père Pierre Arrivetz était décorateur et possédait un magasin de meubles à Lyon. Il a travaillé, entre autres, avec Norman Foster et Philippe Starck. C’était l’un des premiers en France à vendre du design contemporain, dès les années 1960-1970. C’était bien avant l’explosion des éditeurs comme Cassina, par exemple ! Mon père est architecte. Mes parents collectionnaient l’art. J’ai grandi à Lyon, entourée d’artistes, de musiciens, de gens qui faisaient beaucoup la fête, dans un milieu un peu hétéroclite. On a aussi beaucoup voyagé. Dans le salon, vous voyez la mappemonde de mon grand-père épinglée de tous les endroits dans lesquels il s’est rendu. Il a dû faire quatre fois le tour du monde ! Nous avons été une famille très libre avec une grande ouverture d’esprit. C’est toujours ce qui domine ma vie et ce que j’essaie de transmettre à mes enfants.

Adrien

Je suis d’origine arménienne, j’ai grandi à Lyon. Dans une fratrie où la musique a joué un rôle très important. Ma grand-mère jouait du piano classique, mon père était également pianiste, mon frère avait un groupe de musique à Lyon. D’un point de vue familial, ça nous a beaucoup bercés, ces moments chaleureux autour du piano, et on les reproduit quand on se retrouve à Noël. Il y a chez nous un vrai lien entre famille, musique et convivialité. Oscar, qui a 7 ans, commence à aimer la musique. C’est un bonheur de pouvoir lui faire découvrir des choses, de transmettre et de partager. Là, il est dans sa période rap. Hier, il a dégotté une cassette dans mes placards. Il m’a demandé « qu’est-ce que c’est que ça ? » C’était drôle.

TSF

Comment influencez-vous mutuellement vos goûts ?

Jordane

Je pense qu’Adrien et moi, on est très complémentaires dans nos histoires et dans ce qu’on aime. Moi, j’ai une histoire familiale très liée à l’architecture et au design.

Adrien

De mon côté, j’ai plutôt grandi dans la musique, la générosité d’une table très garnie ! D’où l’importance de créer une place de choix pour ma platine et mes vinyles… Jordane a dessiné un meuble bas, sur mesure, pour que mes disques puissent parfaitement s’y ranger.

TSF

Où vous retrouvera-t-on bientôt ?

Jordane

Nous avons terminé récemment la barge Noti Club qui se tient au pied de la tour Eiffel et abrite un restaurant et une salle d’événementiel. Et nous travaillons activement sur plusieurs projets d’hôtels, et sur la plage du Majestic à Cannes qui sera dévoilée lors du prochain festival du cinéma.

Adrien

On a une actualité bouillonnante avec mon associé Alexis Delamare ! Chez Renaissance, nous travaillons en ce moment avec le Musée d’Orsay qui lance en 2024 plusieurs projets autour de l’art digital et des NFTs, dont une première exposition en février qui mettra en avant l’art et la musique d’Agoria, l’un des pionniers de cette nouvelle scène.

TSF

Que représente The Socialite Family pour vous ?

Jordane

Cette idée de la famille au sens large, en dehors des normes. Contemporaine, vivante, imparfaite, cosmopolite. Nous, on aime le contraste, l’imperfection, la vie.

TSF

Quelle pièce préférez-vous dans notre collection ?

Jordane

J’aime l’étagère d’angle Mara pour son design minimal, qui permet d’habiller les dos de canapés, que j’aime beaucoup placer au milieu des pièces dans mes projets !

TSF

Avez-vous quelques bonnes adresses du quartier à nous recommander ?

Jordane & Adrien

On adore ce nouveau quartier, à la limite entre le Marais où nous travaillons et le 10e plus populaire. Nous flânons souvent au magasin de vinyles SuperFly (53 rue Notre-Dame-de-Nazareth, Paris 3e) et au café de spécialités Borough (61 rue Notre-Dame-de-Nazareth, Paris 3e). On trouve le meilleur humus de Paris chez Chiche (29 bis rue du Château-d’Eau, Paris 10e) et des Lahmacun chez Urfa Durum (58 rue du Faubourg-Saint-Denis, Paris 10e), comme on les mangeait chez la grand-mère arménienne d’Adrien.

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