Le laboratoire d'idées d'une créatrice engagée

J’ai grandi sur le plateau du Castellet, à côté du circuit Paul Ricard. Mon père était pilote d’essai et metteur au point sur les Formules 1 à la grande époque des courses automobiles. Ma mère y travaillait pour l’école de pilotage anglaise Winfield. C’était l’âge d’or du sport automobile, une de mes nombreuses sources d’inspiration. Après des études de géo-ethnologie, je me suis formée en stylisme modélisme dans une école de mode parisienne, l’atelier Chardon Savard. Dans le même temps, j’ai travaillé au sein de la maison Martin Margiela. J’ai ensuite remporté, en 2006, le Grand Prix Femme des Jeunes Créateurs de Dinard. En 2007, j’ai créé ma marque éponyme et en 2009, j’ai ouvert ma première boutique située dans le Marais. Avec mon équipe, nous avons installé un flagship, le 88 Beaumarchais, qui comprend deux boutiques et à l’étage le studio de création ainsi que le showroom. Dans la première boutique, on peut découvrir mes collections, la seconde est destinée aux collaborations et à Holism, un projet axé sur la maison et l’art de vivre autour de pièces uniques et/ou faites à la main.

Chacune des pièces qui composent le vestiaire est créée autour de matières de qualité choisies pour leur valeur naturelle, recyclée ou durable. Toutes les collections sont de fabrication européenne en France, en Hongrie, au Portugal ou en Espagne dans des ateliers spécialistes partenaires. Mon compagnon, Arnaud, produit les souliers de la collection. Je les dessine et il les fait réaliser dans l’atelier de confection familial.

Mon obsession : créer un vestiaire désirable et juste. Des vêtements que l’on a envie de porter et d’associer suivant ses envies sans subir les diktats obsolètes d’une certaine vision de la mode. Le vêtement représente l’identité. Mon travail consiste à élaborer des pièces de différentes influences et à bousculer au gré des associations une certaine littéralité. Chaque femme est unique et multiple. Un bleu de travail, une blouse féminine fleurie et une veste de tailleur se mélangent sans opposition et apportent la juste dose de cool. J’aime le « craft style » comme l’ultra féminin, les jeux d’opposition, le brut des matières ouvrières, le flou et les transparences de soies, à twister avec des pièces référentes au vestiaire masculin ou military comme des vêtements aux influences plus street. Les imprimés réalisés au sein de mon studio de création équilibrent les couleurs pleines, sourdes ou franches.

Mon compagnon a réalisé notre table de salle à manger. Nous ne trouvions pas ce que nous voulions et avons décidé de travailler le bois dans la démarche japonaise du « shou-sugi-ban » dite du bois brûlé. Ce fut une réelle expérience dans sa mise au point et sa réalisation. Les étapes de brûlage du bois et de lavage afin d’aboutir au résultat voulu nous ont appris la patience à la japonaise.

Le brutalisme, l’artisanat traditionnel transposé au monde actuel : les pièces issues des savoir-faire ancestraux dans une mise en contexte moderne à l’approche instinctive.