Famille

La rénovation réussie d’un duplex de 50 m2 pensé comme un lieu de réception par le fondateur du studio d’architecture Concina

Chez

Thomas Fournier et Alexander Nino

Thomas Fournier aime les challenges ! Un goût du défi pour les projets résidentiels incarné par la rénovation de son propre appartement, un 50 m2 extrait d’un hôtel particulier datant du XVIIIe siècle. Objet d’un coup de foudre partagé par l’architecte – fondateur du studio Concina – et son compagnon, Alexander Nino. Et pourtant. Historique, autrefois flamboyant, le vestige avait perdu de sa superbe en 1722 sous le coup d’une redistribution de ses volumes au détriment de sa structure initiale. Du « gâchis » pour le couple, qui s’est s’attelé à rénover ce bien en en optimisant chaque recoin. Ici, « tout a été pensé et dessiné », nous confie cet ancien de l’agence Laura Gonzalez. Devenus un duplex, les lieux recouvrent après des mois de travaux leur splendeur… désormais optimisée. Une respiration nécessaire pour cet intérieur qui arbore une association équilibrée de matières nobles. C’est avec parcimonie que l’on retrouve de la cuisine à la salle de bains du marbre sous toutes ses couleurs : vert de Bourgogne ou encore rouge d’Alicante. Une minéralité sophistiquée qu’une sélection de textiles vient réchauffer tout en apportant du « confort ». À l’image des créations de maisons Pierre Frey, Dedar ou Jim Thompson, d’élégantes « ponctuations colorées » aux côtés desquelles s’expose le mobilier chiné par le duo. Recelant chacun une histoire, ces objets ont été dénichés pour la plupart aux puces. Celles des villes étrangères qu’ils aiment à visiter, de Lisbonne à Palerme. Un mélange des genres qui leur est cher, à l’image de leur identité multiculturelle et de leurs inspirations. Des acteurs de la scène internationale du design qu’ils citent sporadiquement : de la Française Charlotte Perriand à l’Italien Gio Ponti. Autant d’influences qui ont abouti à la création de cet appartement éclectique, véritable « lieu de réception » affranchi de tous codes, et ce, malgré les contraintes d’espace !

Lieu

Paris

texte

Juliette Bruneau

Photographies

Eve Campestrini

TSF

Thomas, Alexander : pouvez-vous vous présenter ?

Thomas

D’origine toulousaine, je vis à Paris depuis dix ans. Je viens d’une famille italienne du côté de ma mère et polonaise du côté de mon père. Un drôle de mélange ! J’ai créé en janvier 2020 mon propre studio d’architecture et intérieurs – baptisé Concina –, qui a débuté avec des collaborations puis des chantiers menés de front, seul. Je travaille aujourd’hui sur différents projets résidentiels – à Londres et à Paris principalement –, notamment des espaces lounges et de coworking haut de gamme. Un bon début à tout juste 30 ans !

Alexander

Architecte et photographe de formation, je suis originaire de Caracas au Venezuela. Je vis à Paris depuis 2011, une ville devenue un véritable terrain d’expérimentation où j’ai mûri et développé mon parcours professionnel. Diplômé de la Facultad de Arquitectura y Urbanismo de la Universidad Central de Venezuela et de l’ENSA Paris-La Villette, je suis aujourd’hui architecte chef de projet, dans une agence renommée, et photographe à mon compte pour des clients privés.

TSF

  • Quel est votre parcours ?

Thomas

J’ai commencé très tôt à m’intéresser au monde de l’architecture, de la décoration et du design ! Être architecte était une vocation. C’est pourquoi j’ai naturellement intégré une école spécialisée après le bac. J’ai commencé mes études à l’école d’architecture de Toulouse, puis ai intégré l’école de Paris-Belleville pour y faire mon master. J’ai été l’élève pendant deux ans de Pierre-Louis Faloci (Grand Prix national de l’architecture) mais aussi son collaborateur puisque j’ai intégré son studio en parallèle de mes cours. J’y suis resté trois ans à travailler sur des projets publics d’envergure (musées, centres culturels) durant lesquels j’ai conservé mon attrait pour l’univers du design intérieur et de la décoration. Une appétence qui me décida à entrer en 2016 dans l’agence de Laura Gonzalez afin de consacrer tout mon temps à cette passion. Je m’y suis épanoui pleinement pendant trois années en suivant des projets incroyables de boutiques, restaurants et hôtels.

Alexander

Je suis passionné par le dessin et la photographie depuis tout petit ! Je me revois enfant, toujours avec un carnet à la main et un appareil photo jetable dans la poche. Après le bac, j’ai passé le concours pour intégrer la plus prestigieuse école d’architecture publique du Venezuela que j’ai réussi. Mon diplôme en poche, j’ai travaillé pendant un an à Caracas dans une agence d’architecture d’intérieur : c’était la première fois que j’abordais des projets à petite échelle. Je suis venu par la suite à Paris pour étudier la civilisation française à la Sorbonne pendant deux ans. J’ai continué mon parcours à l’école d’architecture de Paris-La Villette pour valider mon diplôme en France et suivre un DSA paysage. Cela m’a amené à travailler pendant un an dans une agence d’architecture à Shanghai. Une expérience incroyable et tellement enrichissante ! En rentrant, j’ai d’abord collaboré avec l’agence IMLC à Paris, puis j’ai intégré la prestigieuse agence de Jean-Louis Deniot pendant trois ans en travaillant sur le projet du Waldorf Astoria à New York. Aujourd’hui, je collabore avec l’agence Humbert & Poyet sur des projets résidentiels et hôteliers.

TSF

  • Parlez-nous de votre éducation. Dans quel cadre avez-vous grandi – et par conséquent développé votre goût ?

Thomas

Ma mère était une passionnée de design et plus particulièrement du design des années 1920 à 1940. J’ai donc grandi entouré de pièces de Charlotte Perriand et d’Eileen Gray. Mon grand-père était également un mordu d’architecture. Il avait par ailleurs – à la fin des années 1930 – intégré les Beaux-Arts dans l’espoir de devenir lui-même architecte. Malheureusement, la Seconde Guerre mondiale l’en a empêché et il a repris l’entreprise de construction familiale « Concina ». C’est ce nom évocateur que j’ai repris pour mon studio Concina architecture et intérieurs. Un clin d’œil à mes origines.

Alexander

J’ai grandi au Venezuela dans les années 1990. À cette période, le pays était encore en plein développement et la culture faisait partie de notre quotidien. J’avais l’opportunité d’être en contact permanent avec des œuvres d’art, que ce soit en marchant dans la rue, dans le métro ou en allant régulièrement au musée Sofía Ímber. Ce sentiment était d’autant plus présent lorsque j’étudiais à l’école d’architecture. Un campus classé à l’Unesco, où se côtoyaient des œuvres d’Alexandre Calder, Gego, Fernand Léger et Jean Arp ! Les années 1940 et 1950 – marquées par les migrations européennes – ont permis le développement d’une architecture moderniste de qualité à Caracas. Je pense en particulier à la villa Planchart de Gio Ponti, une œuvre d’art totale qui fait partie de l’imaginaire collectif des Caraqueños. C’est cette affection toute particulière pour les réalisations de l’architecte milanais qui explique mes visites régulières dans la capitale du design italien. J’adore y chercher des adresses, frapper aux portes et essayer de prendre quelques photos.

J’apporte une attention très particulière au choix des matières et tissus. Cela fait toute la différence dans un projet.

TSF

  • Designers, artisans, artistes : quels sont ceux dont l’œuvre a eu une influence particulière sur vous, votre travail ?

Thomas

Je suis passionné par les architectes italiens des années 1930 à 1970. Je pense notamment à Carlo Mollino et son incroyable appartement à Turin que j’ai eu la chance de visiter. Un moment exceptionnel et une source d’inspiration infinie ! Je suis également très attaché aux œuvres de Piero Portaluppi et d’Osvaldo Borsani ! Nous allons d’ailleurs 4 ou 5 fois par an à Milan faire le plein d’inspiration !

Alexander

Carlos Cruz-Diez, évidemment ! Cet immense artiste cinétique vénézuélien était un génie de la couleur et de la perception. J’ai eu la chance de collaborer avec lui pour la création de son atelier parisien, sûrement le projet le plus enrichissant de ma carrière. Plus généralement, je suis passionné par les designers de la première moitié du XXe siècle : Jules Leleu, Jean Royère, Jean-Michel Frank… Les créations de Carlo Scarpa, Piero Portaluppi, Jacques Grange me séduisent également tout comme les courbes sensuelles du paysagiste brésilien Roberto Burle Marx, les mobiles de Calder et les dessins de la géographie humaine de l’architecte japonais Wajirō Kon. Enfin, comme évoqué précédemment, je suis un fervent admirateur de Gio Ponti. J’ai récemment visité l’université de Padou et la Casa Borletti à Milan. Des chefs-d’œuvre absolus !

TSF

  • Racontez-nous l’histoire de votre rencontre avec cet appartement.

Thomas

J’ai eu un coup de foudre immédiat pour le bâtiment ! Il s’agit d’un hôtel particulier restructuré par Germain Boffrand – architecte du roi et élève de François Mansart en 1722. J’ai trouvé la cour d’honneur magnifique avec son portail Louis XVI et ses colonnes doriques cannelées. Dans les années 1980, l’immeuble a subi d’importants travaux de restauration qui ont complètement redessiné les espaces d’habitation. L’appartement n’avait aucun charme : sol stratifié au premier niveau et moquette à l’étage, escalier monumental droit en béton, cuisine en mélaminé… un logement des années 1980 quelconque dans un écrin magnifique ! Du gâchis ! Au-delà de cela, il disposait d’un atout majeur : ses volumes, avec notamment deux grandes fenêtres de 4,20 m de haut ! Un potentiel incroyable et un super terrain de jeu pour un architecte !

TSF

  • Comment l’avez-vous pensé ?

Thomas

J’ai conservé la disposition de l’appartement en duplex. Sinon, l’ensemble a été revu entièrement ! L’idée était de redonner ses lettres de noblesse à un espace dégradé par le temps et les travaux précédents. Nous avons en premier lieu déplacé et remplacé l’escalier existant par un second en colimaçon d’époque. Il s’agit d’une pièce datant de 1900 qu’un artisan normand a adaptée et retapée spécialement pour nous. Cela apporte du cachet et libère beaucoup l’espace. J’ai remplacé le stratifié par un parquet massif collé en chêne, ajouté des corniches, refait les plinthes et les chambranles, dessiné une bibliothèque sur mesure qui intègre le canapé. Tout a été pensé et dessiné, du plan général à la sélection des objets déco.

TSF

Et « habillé » d’un choix de matières et de tissus très précis ?

Thomas

J’apporte une attention très particulière au choix des matières et tissus. Cela fait toute la différence dans un projet. Cet appartement est avant tout un lieu de vie, où l’on reçoit beaucoup. Je ne souhaitais surtout pas faire un « showroom » trop figé. Les textiles apportent beaucoup de confort à notre duplex. Ils font que les gens se sentent bien, ici ! Nos amis adorent par ailleurs venir passer chez nous les dimanches pluvieux parisiens. La quasi-totalité des tissus proviennent des maisons Pierre Frey, Dedar et Jim Thompson et sont disposés comme des ponctuations colorées dans l’espace. Le marbre est un matériau que j’affectionne beaucoup. C’est la matière noble par excellence. Ici, il est utilisé avec parcimonie, sans être ostentatoire. Les seuils sont en marbre vert de Bourgogne et le plan de travail de la cuisine en marbre sarrancolin. La salle de bains, à l’esprit complètement italien, est habillée – quant à elle – d’un marbre rouge alicante mais aussi de faïences peintes à la main en Toscane.

TSF

La quasi-totalité du mobilier a été chinée. Aviez-vous des envies précises sur ce que vous souhaitiez chez vous ?

Thomas

Au coup de cœur ! Quel plaisir quand on réalise un projet pour soi-même de n’avoir pas d’autres contraintes, que financières évidemment. Cela a mis un peu de temps avant d’avoir tout meublé : quasiment chaque objet a une histoire, et aucun n’est un choix par défaut.

Alexander

Un de mes hobbies – au-delà d’être la première chose que je fais en visitant une ville –   est de trouver le marché aux puces. J’adore rapporter des objets chinés de mes voyages et notamment les céramiques. Mes dernières acquisitions : un service d’assiettes peintes à la main du marché aux puces de Palerme et une collection d’azulejos de la célèbre marque portugaise Viuva Lamego du marché aux puces de Lisbonne.

TSF

  • Quelle est la pièce dont vous êtes les plus fiers ?

Thomas

Il y en a deux ! Ou plutôt quatre : mes deux fauteuils Vico Magistretti chinés sur un site d’enchères en ligne et la paire de lampes en plâtre dans le goût de Jean-Michel Franck qui provient de la galerie Blanchetti à Paris.

Alexander

Tout d’abord la collection de céramiques de mon amie Barbara Billoud qui travaille de manière incroyablement poétique le raku – technique japonaise d’émaillage – sur des pièces allant du vase à la véritable sculpture ! J’adore également les deux pièces de Nicolas Lefebvre – statues sur le cache-radiateur dans le salon et la chambre – que je trouve d’une poésie rare. Et aussi une lithographie de Jésus Soto, clin d’œil à mes origines.

TSF

Que dit votre lieu de vie de vous ?

Thomas

Cet appartement est pensé vraiment avant tout comme un lieu de réception. Même s’il ne fait que 50 m2, on peut dîner facilement à 12 autour de notre table. Une pièce italienne datant des années 1970, placée dans la double hauteur que les gens adorent prendre en photo ! C’est un lieu de vie mais aussi un espace de travail que l’on souhaite accueillant et chaleureux pour nos amis – pour beaucoup acteurs dans le milieu artistique. Cet appartement est donc comme un lieu de rendez-vous ! C’est le point de rencontre de nos proches. Les gens se sentent bien ici, et nous sommes heureux qu’ils s’y sentent bien.

Alexander

Un endroit éclectique où chaque objet est le souvenir d’une rencontre ou d’un voyage. Un endroit pour se retrouver avec les amis, écouter de la musique et parfois, si j’ai de la chance, trouver un bon partenaire pour danser (rires). Il est essentiel pour moi de m’entourer de personnes avec de bonnes énergies, de belles choses, des vêtements élégants et surtout de voyager. Chaque objet que j’ai, chaque personne dans ma vie, chaque vêtement que je porte est là pour une raison : un souvenir, une complicité…

TSF

  • Vous habitez dans le quartier du Haut Marais. Quelles y sont vos adresses favorites ?

Thomas

Le Progrès qui se situe rue de Bretagne ! Une institution où l’on retrouve très régulièrement mes anciens collègues pour boire un verre et décompresser après une journée de travail ! Le Sancerre – rue de Bretagne également, ou le Café de la Poste de la rue de Turenne pour un café le matin avant un rendez-vous de chantier. Pour le déjeuner, direction une fois de plus la rue de Bretagne au restaurant Chez Omar ou encore au marché des enfants rouges où nous avons nos habitudes. Enfin, notre recommandation mode va à la boutique Tom Greyhound rue de Saintonge qui a une supersélection de vêtements homme et femme. Un peu plus loin, vous pourrez également vous arrêter à l’Officine Bully et son Grand Café Tortoni. Une équipe adorable et un univers incroyable !

Alexander

Je vous recommande à mon tour la nouvelle boutique Bully rue Vieille du Temple ! La façade en bois et marbre y est superbe. Autrement, je vous conseille la librairie et galerie Yvon Lambert de la rue des Filles-du-Calvaire qui vous propose une parfaite sélection de livres de photographies. La boutique Archives 18-20 proche de l’Hôtel de Ville est idéale également pour leur sélection pointue d’ouvrages. Enfin, le jardin des Archives nationales, juste à côté, où je vais régulièrement me ressourcer à ma pause-déjeuner !

TSF

  • Pour vous, The Socialite Family, c’est ?

Thomas

Une source d’inspiration ! J’adore cette mise en lumière de l’art de vivre.

Alexander

La joie de découvrir toujours des endroits chaleureux et différents.

TSF

  • vous retrouverons-nous dans les prochains mois ?

Thomas

Autour d’une table pour un déjeuner au soleil… dans une résidence secondaire en Italie, je l’espère !

Alexander

À voyager, l’appareil photo à la main et mon cahier à dessin dans la poche !

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Ronan Teissèdre et Nicolas Jacquemin

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