Famille

En plein centre d'Arles, une maison du XVIIe siècle toute en étages, en recoins et en terrasse

Catherine servel matthew Mitchell arles

Chez

Catherine Servel, Matthew Mitchell et Olympia, 7 ans

Un jour d’hiver comme on les aime : sec et bleu, le soleil dur de ce Midi de la France s’écrasant à angle droit dans les ruelles du centre d’Arles. C’est ici qu’ont choisi de s’installer Catherine Servel, son compagnon Matthew Mitchell et leur fille Olympia. Un changement de vie radical après plus d’une décennie passée à New York. Dans cette maison ancienne, patiemment restaurée, les œuvres de Catherine – photographies, sculptures, mobilier, bijoux – voisinent avec les trouvailles du trio et les céramiques d’Olympia. Ici, on vit dans les étages, grimpant et dégringolant allègrement les marches du XVIIe siècle de cette bâtisse tout en hauteur. The Socialite Family a suivi le rythme. Rencontre.

Lieu

Arles

texte

Elsa Cau

Photographies

Constance Gennari

TSF

Catherine, Matthew, présentez-vous.

Matthew

Je suis Américain, né au Colorado. Et Français d’adoption et de mariage. Notre fille Olympia possède aussi la double nationalité. Que pourrais-je dire d’autre ? J’adore l’art. Je ne suis pas artiste moi-même. J’aime être derrière les artistes qui m’intéressent, qui m’inspirent, les aider à réaliser un projet dans son ensemble. C’est ainsi que j’ai rencontré Catherine. J’habitais à Londres, c’était il y a seize ans. On m’a présenté à une artiste en me disant : « Tu vas adorer, elle est incroyable, son importance sera majeure. Elle s’appelle Catherine Servel. » Pendant plusieurs années, j’ai représenté différents artistes, principalement des photographes d’art et de mode. Et puis, au bout d’un moment, Catherine a eu besoin d’un agent à plein temps, d’un soutien, elle avait beaucoup de travail ; et tous ces projets, il fallait les réaliser.

Catherine

Je suis photographe. Ma vie était complètement absorbée par mon travail jusqu’à ce que j’aie notre fille. Ce qui est amusant, c’est qu’en même temps, mon esprit s’est ouvert à beaucoup d’autres choses. Cela m’a aussi poussée à m’exprimer d’une manière encore plus personnelle. Et m’a mise au défi de continuer à travailler, tout en étant mère.

TSF

Catherine, comment vous êtes-vous renouvelée après ce cap de la maternité ?

Catherine

J’ai varié les supports, en explorant des choses inconnues, en développant d’autant plus cette idée nouvelle de faire des bijoux, mais aussi des sculptures ; ainsi que de chercher dans la photo des sujets autres que ce qu’on me commandait… J’ai cessé de faire ce qu’on me demandait, en fait.

TSF

Parlez-nous de cette marque de bijoux.

Matthew

De Cosmi, c’est une marque, mais ce sont des pièces uniques.

Catherine

Ce sont vraiment des bijoux d’artiste. Le nom provient de plusieurs générations en arrière dans ma famille. Mais je n’avais pas envie de me sentir en lien immédiat. Je voulais séparer mes pratiques, aussi. In fine, tout se nourrit mutuellement en permanence. D’ailleurs, je ne conçois plus tellement d’être cloisonnée dans un seul support. C’est un peu comme si on prenait la route mais en étant obligé d’aller tout le temps tout droit. Et puis, j’avais envie de faire des bijoux dans lesquels on sent l’intervention de la main de l’homme. Avec cette sensation tactile. En plus de l’aspect « pièce unique », précieux. On n’a pas envie que tout le monde porte la même chose que soi… Ces pièces se transmettent comme de petits trésors à nos enfants.

Matthew

De petites sculptures. Quand on voit une céramique qu’on aime, on va la toucher. C’est la même chose.

TSF

Travaillez-vous toujours ensemble ?

Matthew

Oui. Constamment !

Catherine

On communique tout le temps. On partage tout.

TSF

Il faut être sacrément fusionnels pour vivre ensemble, élever un enfant ensemble, travailler ensemble.

Matthew

Oui, c’est ça. Pour certains, ça ne peut pas fonctionner. Pour nous, ç’a marché dès le départ. Cela s’est fait immédiatement.

Catherine

On peut dire qu’on est fusionnels, mais nous avons tout de même des personnalités fondamentalement différentes. C’est-à-dire que nous avons des qualités complémentaires. On ne se marche pas dessus. Chez nous, entre nous, chacun a son rôle, naturellement.

Matthew

Cela ne signifie pas qu’il n’y a jamais de conflit, parce que c’est ça aussi, la réalité de faire un travail créatif ensemble.

Catherine

En tout cas, quand on n’est pas d’accord, cela veut dire que ce qu’on est en train de faire ne fonctionne pas, qu’il manque le déclic. Et donc, qu’il faut continuer de chercher. Et quand on est d’accord, c’est que c’est bon.

Matthew

Et puis il faut savoir (s’)encourager, laisser l’autre, l’artiste, faire des essais, poursuivre son idée, aussi.

TSF

J’ai remarqué que vous étiez très encourageants avec Olympia, votre fille, aussi.

Catherine

Je pense que, comme elle voit de quelle manière on travaille, Olympia s’attend à ce que nous ayons une discussion réelle quand elle me montre quelque chose qu’elle a fabriqué ou dessiné, par exemple. Nous essayons de lui inculquer que, quand on a une idée, il faut la suivre. Mettre l’énergie nécessaire dedans, pour la mener à son terme.

Matthew

Et il n’y a jamais d’échec, bien sûr. Seulement des apprentissages !

Catherine Servel

Ma vie était complètement absorbée par mon travail jusqu'à ce que j'aie notre fille. Ce qui est amusant, c'est qu'en même temps, mon esprit s’est ouvert à beaucoup d'autres choses.

TSF

Comment votre éducation, votre entourage, a-t-il influencé votre goût à chacun ?

Catherine

Ce qui a, quelque part, beaucoup influencé ma personnalité, c’est le fait d’avoir grandi dans un hôtel. C’était en Bretagne, au bord de la mer. De fait, j’aime beaucoup l’océan. Grandir dans un hôtel, c’est n’être jamais seul avec sa famille, c’est vivre avec les employés et les clients. Ce qui a des avantages : toujours beaucoup de vie et d’animation, un souci constant du détail dans les intérieurs, tout doit être parfait. Enfant, j’adorais me faufiler dans les cuisines, goûter au dernier gâteau du pâtissier… Les pêcheurs venaient à l’arrière de l’hôtel déposer la pêche du jour. J’y ai beaucoup observé le quotidien :  on est dans une micro-société et on vit des moments merveilleux. Mais il est vrai que cela m’a un peu manqué de ne pas avoir notre propre maison, sans personne d’autre que ma famille. Ce qui est certain, c’est que cette expérience a influencé ma personnalité, mes goûts en tout cas. Ce dont j’ai envie dans ma vie ou dans mon travail.

TSF

Il ressemblait à quoi, cet hôtel, Catherine ?

Catherine

C’était l’hôtel de mes grands-parents. C’était donc un vieil établissement avant qu’il ne soit refait de façon plus moderne. Toutefois, il est resté un peu à l’ancienne : il y avait un bar avec un juke-box, un billard…

Matthew

Quant à moi, ma mère a beaucoup influencé mes goûts. Et sans doute aussi ma façon d’être ! Elle était artiste et décoratrice d’intérieur. Avant cela, elle a étudié l’art, ou plutôt les beaux-arts. Quand j’étais enfant, elle me promenait de chantier en chantier. Moi aussi, j’ai beaucoup observé à ces occasions : ses choix à elle, les matériaux, les couleurs, les discussions avec les clients pour arriver à une certaine ambiance, les ouvriers au travail. Dès mon plus jeune âge, j’avais donc un avis très fort au sujet de ce qui m’entourait, même si on ne me demandait pas spécialement mon opinion. Je retrouve ça chez notre fille, Olympia. D’ailleurs, je crois beaucoup qu’on a une personnalité dès l’état de nourrisson, qu’on développe au fur et à mesure.

Catherine

Bien sûr, l’environnement dans lequel tu évolues fait que certaines tendances vont pouvoir se développer. Un peu comme l’envie depuis toujours d’Olympia de faire de la céramique. Elle a commencé à rendre visite à une voisine qui en faisait. Un jour, la céramiste m’a dit qu’elle commençait à donner des cours. Cela s’est fait aussi simplement que ça. Elle aime aussi beaucoup la musique et le chant, la peinture… Jamais nous ne lui imposons quoi que ce soit à ce niveau : c’est son évolution personnelle. Mais qui peut avoir lieu aussi dans cette maison où la création est au premier plan.

Matthew

Olympia a tellement de chance d’avoir Catherine comme mère ! Parce qu’elle voit tout ce que Catherine fabrique, elle observe notre façon de travailler ensemble, de discuter de tout. Qu’elle voie sa mère faire des choses, cela me paraît essentiel pour la femme en devenir qu’elle est.

Catherine

C’est important qu’elle sache que tout est possible. Qu’on naisse fille ou garçon. Elle a la chance de ne pas souffrir de la comparaison qui peut se faire insidieusement : elle est fille unique, pas de frère en vue. Elle est libre.

TSF

Comment avez-vous découvert cette maison ?

Catherine

On avait une amie ici qui savait que nous cherchions quelque chose dans la région. Un jour, elle nous a envoyé un message en nous expliquant que sa mère vendait la sienne, dans le centre d’Arles. On n’était pas encore au courant de la difficulté que c’est de trouver une maison ancienne, sur plusieurs niveaux mais de la même époque, en plein centre ! Elle demandait beaucoup de travaux, on a hésité.

Matthew

Dans les éléments visibles, il y avait des choses du XVIIe siècle.

Catherine

Là-dessus, alors qu’on était en pleine hésitation, il y a eu un confinement, on ne pouvait plus rien visiter. C’était un peu comme si le destin nous avait mis à cet endroit. La suite, ce furent six mois de travaux !

TSF

Expliquez-nous comment vous avez investi ce lieu.

Catherine

Quand on est arrivés, franchement, on ne savait pas du tout ce qu’on voulait faire. On a regardé la maison, on a vu qu’elle était belle et ancienne, qu’elle avait une belle structure, mais on venait d’un appartement à New York à l’esthétique complètement différente – nous vivions dans une église désacralisée ! On n’avait pas du tout les références de cet environnement-ci. On a décidé d’en faire notre projet commun, un de plus, et on s’est retroussé les manches ! On a commencé à étudier l’histoire des maisons du coin.

TSF

Le point de départ était donc de s’ancrer dans quelque chose d’assez local.

Catherine

Et de le faire d’une façon modeste. On voulait se mettre au service de la maison, voilà.

Matthew

Pendant cette phase de recherche, on a découvert que ce sont des maisons splendides, spectaculaires et qu’elles ont été presque toutes gâchées pendant les années 1950, bétonnées, mal modernisées. Ici, il y avait du carrelage blanc brillant. Vous vous tenez sur un plancher du XVIIe siècle qu’on a chiné. L’idée, c’est de renvoyer l’impression que tout est d’origine et harmonieux. Qu’on passe la porte de cette maison en se disant que « tout a toujours été là ».

TSF

On retrouve ce souci du détail dont vous parliez, Catherine : les prises, les poignées, les interrupteurs, tout a l’air choisi avec soin.

Matthew

Il n’y a pas un détail dans toute la maison qui n’a pas été réfléchi et validé.

Catherine

C’était essentiel aussi que n’apparaisse aucune baguette, nulle part. Que les murs soient comme tracés à la règle, mais sans délimitation. Ça ne rend pas le même effet. Ensuite, on a créé beaucoup de petites niches dans les murs.

TSF

Pouvez-vous me parler de votre endroit préféré dans la maison ?

Catherine

Ça dépend des moments. Pendant un temps, on adorait la pièce qu’on appelle le salon gris (parce que le plafond est gris). C’est un peu un salon de lecture, un bureau, une salle de cinéma pour nous.

Matthew

Devant la cheminée, en bas, bien sûr. L’hiver, dans cette région, c’est un rêve. L’été, je le passe sur la terrasse en haut, avec mes autres bébés, mes plantes.

Catherine

J’adore être dans l’atelier, aussi, à côté de la terrasse, à l’avant-dernier étage de la maison.

Matthew

Je vais affirmer pour toi que ce doit être ton espace préféré, parce que je te trouve constamment ici quand je te cherche.

Catherine

L’atelier bénéficie de trois points de lumière distincts, ce qui le rend très agréable. Et d’une fenêtre qui avait été rebouchée avant notre arrivée et qui a constitué une surprise de chantier, une découverte avec sa belle vue !

TSF

Quel a été le plus gros défi de ces travaux ?

Catherine

Sans doute le plafond du salon gris, avec ses poutres décorées si finement.

Matthew

On ne savait pas ce qu’on allait découvrir, c’était recouvert d’un faux plafond. Et accessoirement de 10 tonnes de béton posées sur le sol de la pièce au-dessus, pesant sur ce plafond.

Catherine

En fait, au fur et à mesure, les travaux ont révélé une autre maison.

Matthew

Toutefois, il a fallu se poser des questions pratiques. Par exemple, les maisons ici n’ont pas de placards quand elles sont très anciennes. Il fallait imaginer une façon d’incorporer des placards sans que ce soit laid, une belle cuisine, les choses modernes dont on a besoin. Le placard d’entrée, au rez-de-chaussée, pour les manteaux, est le fruit d’une vraie réflexion ! Vous n’en remarquez presque pas la porte dans l’entrée, mais, en réalité, il est creusé et très profond. Sinon, de manière générale, Catherine a dessiné pas mal de notre mobilier. Par exemple la petite table dans la niche, dans le salon près de la cheminée, où Olympia dessine. Les lampadaires en papier mâché sont aussi de Catherine. Le lit d’Olympia.

TSF

Et Olympia, elle l’aime, cette maison ? L’adaptation n’a pas été difficile ?

Catherine

Je me rappelle que, lorsqu’on a eu la clé et seulement à ce moment-là, on l’a emmenée visiter la maison. C’était avant les travaux. Olympia s’est mise à jouer dans la petite cour, puis à admirer la cheminée, puis elle a grimpé tout en haut sur la terrasse : elle s’est sentie bien. Elle a pris la clé de la maison. Elle était contente. C’était vraiment un joli moment.

TSF

Voulez-vous me parler d’un objet que vous aimez en particulier chez vous ?

Catherine

On est dans notre chambre. Vous voyez une toile et un lampadaire qui font partie d’une étude plus large pour moi sur les formes abstraites. Cela répond en quelque sorte, ou fait suite, à ma série de photographies qui montre des formes, des chairs presque de façon abstraite dans le salon gris. C’est un peu le développement de cette même idée. C’est une série que j’appelle Les Plasticines.

Matthew

C’est l’idée d’un mouvement, d’une énergie.

Catherine

Je pense que cette série va se prolonger en collection de bijoux.

TSF

Quelles sont vos prochaines actualités ?

Matthew

Catherine finalise des pendentifs en or massif fondu pour De Cosmi. Ce sont des typographies : les lettres et les numéros sont assez “organiques” dans leur forme, robustes en poids et en taille et ils se portent en pendentifs. Ils ont un aspect très tactile et “yummy” – on voudrait les toucher dès qu’on les voit.

TSF

Quelles sont vos adresses préférées à Arles ?

Catherine & Matthew

On aime déjeuner à La Cachette : le sandwich aux pétales de cabillaud sur du pain hallah est délicieux et parfumé avec plein d’herbes. On chine souvent des meubles et des objets chez  Julie Barreau, tout est beau et Julie a un œil très pointu. Pour une glace artisanale qu’Olympia adore, surtout les parfums thym et figue, c’est chez Arelatis à côté de chez nous.

TSF

Quelles pièces préférez-vous dans la collection The Socialite Family ?

Catherine

Les coussins Berlingot Divino dont la forme est très attirante

Matthew

Les modules d’assise Rotondo dont les rayures et la forme sont très fraîches, assez italiennes. Selon moi une pièce forte et facile à mélanger avec les objets et meubles anciens comme nous aimons le faire !

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