Familles
L'« appartement-maison » Hauvette & Madani
Chez
Samantha Hauvette et Swan, Achille 5, May 2 ans
Deux appartements en un : c’est la particularité de cette première visite de l’année ! Un écrin familial entièrement repensé par sa propriétaire, Samantha Hauvette, pour « montrer » le style Hauvette & Madani. Cofondatrice de l’agence, l’architecte a souhaité profiter du caractère personnel du chantier pour y insuffler les codes et les inspirations du duo créatif qu’elle forme avec Lucas Madani depuis maintenant dix ans. Rencontrés sur les bancs de l’école Camondo, les deux amis sont en quête permanente du « juste équilibre ». Celui du rendu naturel et évident, qui, comme pour la maison Hauvette & Madani – nom donné au projet –, donne l’impression qu’il a toujours été là. Pour sa transformation, la Parisienne n’a pas hésité à bousculer la structure initiale du lieu en en optimisant le plan. La cuisine est ainsi passée du rez-de-jardin à ce qui fut, du temps des anciens occupants, le bureau. Pour ne pas la fermer totalement, la jeune femme a imaginé un système de trois arches dont deux comblées de miroirs pivotants pour jouer avec la lumière. Une façon de relier les espaces tout en douceur que l’on aperçoit à plusieurs reprises dans l’appartement-maison. Intemporelle grâce à une enveloppe sobre réalisée à partir d’une palette de matériaux choisie avec application – ici marbre, bois ou encore zellige –, l’allure des volumes l’est aussi grâce au talent éprouvé de Samantha pour les mélanges. Ceux d’objets et de meubles aux styles et aux époques différents. Une véritable richesse de lignes qui se mêlent à des souvenirs familiaux, des collaborations entre amis ou à des pièces de design iconiques chères au cœur du couple et qui rendent cette réalisation aussi forte visuellement qu’agréable à vivre en famille ! Fidèle à elle-même, la maman d’Achille (5 ans et demi) et de May (2 ans et demi) n’a pas laissé l’environnement de ses enfants en reste. Colorées, joyeuses : leurs chambres ont été soignées avec autant d’application que celle des adultes ! Une décoration pensée jusque dans les moindres détails pour « leur donner envie de l’investir, afin d’éviter que ce ne soit (trop) le cas dans le salon ! (rires) ». Car après tout, pourquoi cela serait-il réservé aux grands ?
Lieu
Paris
texte
Caroline Balvay
Photographies et Vidéos
Constance Gennari
TSF
Samantha, Swan : pouvez-vous présenter ?
Samantha
Swan travaille dans l’industrie pharmaceutique et moi, je suis architecte d’intérieur et designer. Nous avons deux enfants, Achille (5 ans et demi) et May (2 ans et demi), et avons eu un coup de cœur pour cet « appartement maison » dans lequel nous vivons depuis maintenant deux ans !
TSF
Quel est votre parcours ?
Samantha
J’ai fait mes études à l’école Camondo à Paris, j’y ai rencontré mon ami et associé Lucas Madani il y a maintenant plus de 10 ans (déjà !). Notre diplôme en poche, nous avons immédiatement fondé Hauvette & Madani. Insolence de notre jeunesse certainement, mais c’était la plus brillante de nos idées !
TSF
Comment s’est faite votre éducation au « beau » ?
Samantha
Je dirais 100% familial ! Un grand-oncle peintre, une grand-mère sculptrice, une maman qui a toujours poussé les meubles, transformé les lieux. Cet héritage m’a nourrie et me nourrit toujours beaucoup. Il m’a surtout apporté l’envie de créer des lieux intemporels, où les influences des générations précédentes se mélangent aux inspirations contemporaines.
Swan
Même si mon parcours n’a rien de « créatif », comme Sam, c’est depuis mon enfance que je baigne dans le « beau ». Ma maman est une décoratrice et peintre de talent et je suis très heureux aujourd’hui de transmettre ce goût des belles choses à nos enfants.
TSF
Samantha, vous êtes la cofondatrice de l’agence Hauvette & Madani. Racontez-nous son histoire, votre organisation au sein de celle-ci avec votre binôme, Lucas Madani.
Samantha
Comme je le disais, Lucas et moi nous sommes rencontrés sur les bancs de Camondo. Nous étions très amis et, un peu par hasard, la question de monter notre agence s’est posée au cours de l’été de notre diplôme. Cela fait plus de dix ans maintenant, nous n’avons aucun regret !
TSF
Cet intérieur est estampillé comme étant « La maison Hauvette & Madani ». Racontez-nous votre réflexion autour de celle-ci.
Samantha
Pendant un moment, Lucas et moi avons cherché à ouvrir un showroom, mais impossible de trouver LE lieu idéal. Alors, quand, avec Swan, nous avons acheté cet appartement, il paraissait évident de profiter du caractère personnel du chantier pour montrer le style Hauvette & Madani, ses influences et, plus tard, d’y recevoir nos clients.
TSF
En quoi est-elle représentative du style de votre duo ?
Samantha
On y retrouve nos codes, les designers et les matériaux qui nous inspirent, les époques également… En fait, nous sommes en quête permanente du juste équilibre, des bons mélanges, sans dépendance absolue à l’historique d’un lieu, avec toujours l’idée d’un rendu naturel et évident. Comme là depuis toujours. Notre duo, c’est vraiment ça : un plan très optimisé, une enveloppe patinée et sobre, une collection d’objets et de meubles de styles et d’époques différents. Le travail à deux est très bénéfique à cette approche, l’un ajoute, l’autre retire comme sur une vieille balance.
TSF
Quelles ont été vos inspirations pour sa réalisation ?
Samantha
Les mêmes que pour tous nos projets. L’avantage, c’est qu’elles sont tellement nombreuses qu’elles permettent de ne pas nous répéter et de piocher à chaque fois de nouvelles choses. Nous sommes aussi émus par la richesse des laques de Coromendel ou des courbes de Barbara Hepworth, par la simplicité scandinave d’Axel Einar Hjorth que par la rigueur de Jean Michel Frank, le brutalisme de Pierre Chapo, l’avant-gardisme de Charlotte Perriand ou l’atmosphère rock et sexy des années 1970-1980 françaises et italiennes… Et j’en passe !
Pour la cuisine c'était un « jeu de l’équilibriste » : la confrontation entre l’ébène de macassar verni, très précieux, que nous avons dédramatisé avec la pierre de lave émaillée, le chêne naturel et les menuiseries blanches (...)
TSF
Comment l’avez-vous meublée ?
Samantha
Un heureux mélange, un bon mix ou remix ! On peut y apercevoir quelques pièces familiales comme certains tableaux de mon grand-oncle Didier Bereny ou du parrain de mon père, Jean Dupuis. Un dessin d’Hermès – je l’adore – acheté à Nathalie de la Galerie Française, avec qui nous collaborons régulièrement depuis. Des appliques « soleil » en fer forgé et une paire de chandeliers en argent qui me viennent de mon oncle. Et puis, nous retrouvons évidemment nos chouchous : il y a toujours quelques meubles USM, des togos de Ligne Roset, notre canapé Achille (Hauvette & Madani), une chaise longue et une table basse de Charlotte Perriand. Notre applique Fly Gaby réalisée en collaboration avec nos amis Carole et Pierre Emmanuel de la galerie MCDE, ainsi qu’un ensemble de salle à manger et des tables de chevet dessinés avec Soha Concept et le sculpteur Denis Milovanov.
TSF
Quelle pièce avez-vous eu le plus de plaisir à imaginer ?
Samantha
La cuisine, je crois ! L’une des parties que nous affectionnons particulièrement dans notre job, c’est de résoudre le puzzle que représente généralement le tout premier plan d’un projet. Ici, la cuisine était initialement en rez-de-jardin. Nous l’avons installée dans le bureau de l’ancienne propriétaire. N’étant pas fana des cuisines totalement ouvertes, il a fallu imaginer une manière de la mettre à distance, sans la fermer totalement. Nous avons alors imaginé trois arches dont deux comblées de miroirs pivotants, permettant de jouer avec les reflets de la lumière. Vient ensuite le « jeu de l’équilibriste » : ici, c’est la confrontation entre l’ébène de macassar verni, très précieux, que nous avons dédramatisé avec la pierre de lave émaillée, le chêne naturel et les menuiseries blanches. Enfin, derrière une porte de placard, une arrière-cuisine qui permet de tout planquer… le rêve (rires) !
TSF
Vous faites souvent cohabiter des grands noms du design avec des signatures plus contemporaines. Quels sont ceux qui vous suivent depuis toujours ?
Samantha
J’en ai déjà cité pas mal (rires) !Mais je ne peux pas passer à côté de Carlo Scarpa, Ricardo Bofill, Angelo Mangiarotti, Josef Hoffmann, Jacques-Émile Ruhlmann ou encore Olivier Mourgue. Je voue également une grande passion pour le mobilier brésilien époque 1950-1960 de Jorge Zalszupin, Joaquim Tenreiro et Martin Eisler. Je mélangerais tout ça avec les pièces de la dernière collection de Haos, deux-trois luminaires du duo Garnier & Linker ou de Marine Breynaert, et le mobilier poétique de Pierre Yovanovitch dont j’adore le travail.
TSF
Vous venez d’achever la rénovation du nouvel hôtel Le Wallace. Comment avez-vous appréhendé cette « nouveauté » ? Cela vous a-t-il ouvert de nouveaux horizons ? Bousculé votre manière de travailler ?
Samantha
De nouveaux horizons, bien sûr, et réjouissants qui plus est ! Cela fait dix ans que nous travaillons principalement sur des projets privés. Ce sont des projets aux enjeux multiples et complexes et nous avons adoré transposer ces codes de l’habitat privé à l’échelle d’un hôtel comme le Wallace. Le Wallace restera un projet très particulier pour nous. Au-delà d’être notre tout premier hôtel, il marque aussi la naissance de la marque hôtelière Orso, lancée par le couple à la ville, comme à la scène, Louis et Anouk Solanet… une très belle aventure de famille et d’amitié !
TSF
Pour vous, The Socialite Family c’est ?
Samantha
Une mine d’inspiration toujours qualitative, des pièces de design accessibles et intemporelles… Ce qui répond parfaitement à une question que l’on nous pose souvent : possible d’avoir un bel intérieur quand on a des enfants en bas âge (rires) ?